Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/254

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CHAPITRE XX.

LE COLPORTEUR ET LA COMTESSE.


Clown. Il y a des colporteurs qui valent mieux que vous ne pensez, ma sœur.
Shakspeare.. Le Conte d’hiver, acte IV, scène 3.


Dans sa sollicitude à se conformer aux instructions du comte, qui lui recommandaient le plus grand secret, et par suite de ses habitudes sordides et insociables, Tony Foster, dans son intérieur, s’appliquait bien plus à éviter d’attirer l’attention sur lui, qu’à résister aux entreprises d’une curiosité indiscrète. En conséquence, au lieu de s’entourer d’un nombreux domestique pour veiller sur le dépôt qui lui était confié, et défendre au besoin sa maison, il avait cherché, autant que possible, à échapper à l’observation en diminuant le nombre de ses serviteurs. Ainsi, hors les cas où il y avait chez lui des gens de la suite du comte ou de Varney, un domestique mâle, et deux vieilles femmes qui aidaient à tenir en ordre les appartements de la comtesse, étaient les seuls serviteurs qui fussent employés dans la maison. Ce fut une de ces vieilles femmes qui ouvrit la porte à laquelle frappa Wayland et répondit à sa demande d’être admis à montrer ses marchandises aux dames de la maison, par une bordée d’injures empruntées à ce qu’on appelle le dictionnaire des halles. Le colporteur trouva moyen d’apaiser ses clameurs en lui glissant un groat d’argent dans la main, et en lui promettant de lui faire cadeau d’un morceau d’étoffe pour se faire une coiffe, si la dame lui achetait quelque marchandise.

« Dieu te bénisse, car la mienne est en pièces… Glisse-toi dans le jardin avec ton paquet, mon brave homme, elle s’y promène en ce moment. » Elle introduisit donc le colporteur dans le jardin, et, lui montrant du doigt un vieux pavillon en ruine, elle ajouta : « Elle est là-bas, mon brave homme, elle est là-bas… Elle vous achètera si vos marchandises sont de son goût. »

« Elle me laisse aller à la garde de Dieu, » se dit Wayland quand il entendit la vieille fermer la porte derrière lui. « Mais on ne me battra pas, on ne me tuera pas pour une faute si légère et par un