Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/447

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le recueil entier de ballades, d’almanachs et d’histoires à deux sous, bien enveloppé de parchemin et lié par une corde pour plus de sûreté, est encore un objet recherché par les antiquaires, était l’ingénieux personnage chargé de la direction du spectacle, et se montrait vaillamment sur son cheval de bois à la tête de la troupe d’Anglais. « Bien troussé, » dit Lancham en brandissant sa longue épée, « et ainsi qu’il convenait à un vieil homme de guerre qui s’était battu au siège de Boulogne, sous le fier Henri VIII, père de la reine. » Ce chef fut, comme l’exigeaient la raison et le droit, le premier à entrer en lice ; et en passant devant la Galerie, à la tête de ses mirmidons, il baissa la poignée de son épée en face de la reine, et exécuta une gambade telle qu’on n’en avait jamais vu faire à cheval de bois à deux jambes. Défilant ensuite avec toute sa troupe de cavaliers et de fantassins, il les rangea, avec son expérience militaire, à l’extrémité opposée du pont, sur l’emplacement qui devait servir d’arène, en attendant que ses antagonistes fussent préparés au combat.

Il n’attendit pas long-temps ; car la cavalerie et l’infanterie danoises, qui n’étaient nullement inférieures aux Anglais en nombre et en valeur, arrivèrent immédiatement, précédées de la cornemuse du Nord, en signe de leur origine, et commandés par un habile ingénieur qui ne le cédait en fait de discipline militaire (si toutefois il le cédait à quelqu’un) qu’au célèbre capitaine Coxe. Les Danois, comme assaillants, prirent leur poste sous la Galerie de la tour, en face de celle de Mortimer. Tous ces arrangements terminés, on donna le signal du combat.

La première attaque ne fut pas très vive, car chaque parti craignait d’être poussé dans le lac ; mais des renforts arrivant de tous côtés, ce qui n’était d’abord qu’une escarmouche devint une véritable bataille. Ils fondirent les uns sur les autres, comme l’affirme maître Lancham, ainsi que des béliers enflammés de jalousie, et le choc fut si furieux que les deux partis furent souvent renversés, et qu’il y eut un horrible fracas causé par le retentissement des bâtons sur les boucliers. Alors arriva ce qu’avaient redouté les guerriers les plus expérimentés au commencement du combat : les balustrades qui garnissaient les bords du pont, et qui, peut être à dessein, n’avaient été que faiblement construites, cédèrent sous la pression de la foule qui se portait au combat, en sorte que le brillant courage de quelques uns des combattants put suffisamment se refroidir. Cet accident aurait pu occasionner un mal plus sérieux que celui qui