Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/450

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— Si ces marques de mon mépris vous déplaisent, répondit le comte, défendez-vous à l’instant même, dans la crainte que je ne renouvelle le traitement dont vous vous plaignez.

— Il n’en sera pas besoin, milord, dit Tressilian ; que Dieu soit juge entre nous, et que votre sang, si vous périssez, retombe sur votre tête. »

Il finissait à peine cette phrase que leurs épées se croisèrent de nouveau.

Mais Leicester qui, entre autres talents recherchés à cette époque, possédait parfaitement l’art de l’escrime, avait suffisamment remarqué la veille le savoir et l’adresse de Tressilian, pour se battre avec un peu plus de précaution que la première fois, car il préférait une vengeance certaine à une vengeance précipitée. Pendant quelques minutes ils combattirent avec une habileté égale, de part et d’autre, lorsque Tressilian, ayant fait un écart désespéré, que Leicester réussit à éviter, se trouva découvert ; dans une seconde tentative pour recroiser le fer, le comte lui arracha son épée des mains et l’étendit à terre. Avec un sourire farouche il posa la pointe de son arme à deux pouces de la gorge de son ennemi renversé, et lui plaçant le pied sur la poitrine, il lui dit d’avouer ses criminels outrages envers lui, et de se préparer à la mort.

« Je n’ai à me reprocher ni crimes ni outrages à ton égard, répondit Tressilian, et je suis mieux préparé à la mort que toi. Use de ton avantage comme il te plaira, et puisse Dieu te pardonner ; je ne t’ai pas donné de cause d’en agir ainsi.

— Pas de cause ! s’écria le comte, pas de cause ! Mais pourquoi parlementer avec un tel misérable ? meurs en menteur, comme tu as vécu. »

Il avait levé le bras dans le dessein de lui porter le coup fatal, lorsqu’il se sentit soudainement arrêté par derrière.

Le comte se retourna avec fureur pour se débarrasser de cet obstacle inattendu ; mais il fut surpris de voir un enfant d’une physionomie bizarre, qui s’était saisi du bras avec lequel il tenait l’épée, et s’y attachait avec une telle ténacité, qu’il ne put s’en débarrasser sans une violente lutte, pendant laquelle Tressilian trouva le moyen de se relever et de ressaisir son arme. Leicester se retourna de nouveau de son côté avec des regards pleins d’un acharnement qui ne s’était pas affaibli ; et le combat allait recommencer avec plus de fureur des deux côtés, lorsque le jeune garçon se jeta aux genoux de Leicester, et d’une voix perçante le supplia de l’écouter