vent recevoir une amère leçon de l’expérience. Hier encore, je parlai à Magnus : en bien ! quelle fut sa réponse ? « Bonne Norna, vous devenez vieille. » Et ces paroles sont sorties des lèvres d’un homme qui me doit tout… du descendant des anciens comtes norses… c’était Magnus qui me les adressait, et en faveur d’un fripon que la mer a rejeté comme un débris de naufrage ! Puisqu’il dédaigne l’avis de la vieillesse, il écoutera peut-être celui de la jeunesse ; encore a-t-il le bonheur de n’être pas abandonné à sa propre folie. Allez donc à Burgh-Westra, comme de coutume, pour la fête de la Saint-Jean-Baptiste. — Je ne suis pas invité ; je ne suis ni regretté ni souhaité ; on ne songe plus à moi… Peut-être ne me reconnaîtra-t-on pas à mon arrivée ; et pourtant, bonne mère, pour dire la vérité, j’avais pensé à m’y rendre. — C’était une bonne pensée, il faut la mettre à exécution, poursuivit Norna ; nous visitons nos amis quand ils sont malades de corps ; pourquoi ne le ferions-nous pas, lorsqu’ils sont malades d’esprit et rassasiés de bonheur ? Ne manquez pas d’y aller, peut-être nous y rencontrerons-nous. Mais nos routes sont différentes. Adieu ; ne parlez pas de notre rencontre ici. »
Ils se quittèrent ; Mordaunt demeura près du lac, les yeux attachés sur Norna jusqu’au moment où la haute taille de la prophétesse devint invisible dans les détours de la vallée qu’elle remontait ; alors Mordaunt revint chez son père, déterminé à suivre un conseil qui répondait si bien à ses propres désirs.
CHAPITRE XI.
le réformateur.
Le jour de la fête approchait, et nulle invitation n’était encore
arrivée pour cet hôte sans qui, peu de semaines auparavant, nulle
réjouissance n’avait lieu dans l’île. D’un autre côté, à en croire les
bruits qui couraient dans le public, le capitaine Cleveland était