Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/174

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nes jouât son rôle aussi parfaitement que les suivantes de Cléopâtre, qui, adoptant la queue de poisson des sirènes véritables, savaient néanmoins trouver de la grâce dans tous leurs mouvements[1] ; car si elles n’eussent laissé leurs jambes dans leur état naturel, il aurait été impossible aux sirènes shetlandaises d’exécuter la jolie danse dont elles récompensèrent la compagnie pour la prompte admission qu’on leur avait accordée.

On découvrit bientôt que ces masques n’étaient pas des étrangers, mais une partie des conviés qui, s’étant échappés de la salle quelques minutes auparavant, s’étaient ainsi déguisés pour donner de la variété aux amusements de la soirée. La muse de Claude Halcro, toujours active en pareille occasion, leur avait fourni une chanson de circonstance dont nous pouvons donner une imitation. Les strophes étaient alternativement chantées par une néréide et un triton. Les hommes et les femmes, partagés en deux groupes, formaient deux chœurs, qui accompagnaient le chanteur principal ou répétaient le refrain.


CHANTS DES SIRÈNES ET DES TRITONS.
I.
la sirène.
Au sein des vagues mugissantes,
Sur des lits de perles brillantes,
Du Nord nous chantons les combats ;
Et là, dans ces sombres climats,
Dans ces cavernes, de l’orage,
À notre oreille bat la rage
Aussi bas, aussi doucement
Que le soupir d’un jeune amant.
Mais quoique dans le sein des ondes
Le repos règne autour de nous,
Nous quittons nos grottes profondes,
Joyeux fils de Thulé, pour danser avec vous.


II.
le triton.
Nous brisons les trombes naissantes ;
Nous chassons le serpent de mer ;
De nos conques retentissantes
Le bruit se mêle au flot amer ;
De nos conques harmonieuses
  1. Voir une admirable discussion de ce passage dans le Variorium Shakspeare.