Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/204

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

trez de vous en remettre le prix, quand mon poisson salé d’Urkester aura paru au marché. — Arrangez l’affaire entre vous, » dit le colporteur empochant les espèces de Mordaunt ; « la boîte est achetée et vendue. — Et comment, » s’écria le capitaine Cleveland qui survint tout-à-coup, « osez-vous vendre une deuxième fois ce que vous m’avez déjà vendu ? «

Toute la compagnie fut surprise de cette exclamation qui partit soudain, lorsque Cleveland, après avoir paré mistress Baby, entrevit, non sans une certaine émotion, des objets dont Bryce Snailsfoot venait de disposer. À cette courte et sévère question, le colporteur, n’osant guère contredire un chaland d’une pareille espèce, répondit en balbutiant que « le Seigneur savait qu’il n’aurait pas voulu offenser le capitaine. — Comment, monsieur, s’écria le marin, vous ne voulez pas m’offenser, et vous disposez de ma propriété ! » Puis, avançant la main vers la boîte et la chaîne, il ajouta : « Rendez à ce jeune homme son argent, et apprenez à régler votre course sur le méridien de l’honnêteté. »

Le colporteur, confus et rechignant, tira sa bourse de cuir dans laquelle il avait déjà déposé l’argent de Mordaunt ; mais le jeune homme ne voulut pas consentir à cet arrangement.

« Ces objets, dit-il, ont été achetés et payés par moi… ce sont vos propres paroles, Bryce Snailsfoot, M. Halcro les a entendues ; et je ne souffrirai pas que ni vous ni personne m’enleviez mon bien. — Votre bien, jeune homme ? reprit Cleveland ; c’est le mien… je venais d’en parler à Bryce au moment où je me suis éloigné de cette table. — Je… je… je n’avais pas bien entendu, » dit Bryce, avec un désir manifeste de ne les mécontenter ni l’un ni l’autre.

« Voyons, voyons, dit l’udaller ; on ne se querellera point à propos de semblables vétilles ; il faut nous rendre, sans perdre un instant, au grand magasin (c’est ainsi qu’il avait coutume d’appeler la salle de danse) et nous y rendre tous de bonne humeur : les objets resteront pour cette nuit entre les mains de Bryce, et demain j’en désignerai moi-même le propriétaire. »

Les lois de l’udaller dans sa maison étaient aussi absolues que celles des Mèdes. Les deux jeunes gens se regardèrent à la dérobée d’un air de mécontentement, et s’en allèrent de différents côtés.

Il est rare que le second jour d’une fête soit comparable au premier ; les esprits, aussi bien que les jambes, sont fatigués et