Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/281

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semblée pour le service divin, faisait penser qu’il errait du plus fatal côté, et rejetait les doctrines de l’Église loin d’y croire.

Au moment où il arrivait sur le rivage de la petite baie sur le bord de laquelle les ruines sont situées, il ne put s’empêcher de faire halte un instant, et de remarquer que l’endroit qui devait influer sur les sentiments humains, avait été choisi avec beaucoup de jugement pour asseoir une maison religieuse… Par devant s’étendait la mer, dans laquelle deux caps, formant les extrémités de la baie, projetaient leur chaussée gigantesque de roches d’un grès noir ; sur leurs pentes, les mouettes, les courlis et autres oiseaux de mer apparaissaient comme des flocons de neige, tandis que, sur les étages inférieurs des rocs, se tenaient de longues rangées de cormorans placés les uns à côté des autres, comme des soldats en bataille rangée : c’étaient là les seuls êtres vivants qu’on aperçût en ce lieu. La mer, sans être soulevée par la tempête, était assez troublée pour se précipiter contre ces caps avec un bruit pareil à celui du tonnerre lointain, et les vagues, qui s’élevaient en nappes d’écume jusqu’à la moitié de ces roches de grès, formaient un contraste aussi frappant que terrible.

Entre les extrémités de ces deux chaînes de rocs, roulait, à l’instant où Mertoun visitait ce lieu, une masse large et épaisse de nuages qu’un œil humain ne pouvait pénétrer, et qui, bornant la vue et ne permettant pas aux regards de s’étendre au loin sur l’Océan, donnait une représentation assez exacte de la mer dans la vision de Mirza, dont l’étendue était cachée par des vapeurs, des nuages et des tempêtes. Le terrain, qui s’élevait depuis le rivage par une pente escarpée, ne permettait pas d’apercevoir l’intérieur du pays, et semblait voué à une nudité éternelle ; des bruyères chétives et rabougries, entremêlées de ces grands joncs qui couvrent toujours un sol sablonneux, étaient les seuls végétaux que l’œil y découvrait. Sur une éminence naturelle et située sur le bord même de la baie, éminence qui n’était assez éloignée de la mer que pour n’être pas à portée des vagues, s’élevaient les ruines à moitié ensevelies que nous avons déjà décrites, entourées par une muraille ébranlée, délabrée et moussue ; ce mur, éboulé en plusieurs endroits, servait encore à séparer l’enceinte du cimetière des terrains environnants. Les mariniers qui étaient jetés par hasard dans cette baie solitaire, prétendaient que parfois ou voyait l’église pleine de lumières, et, dans cette circonstance, ils avaient coutume de prédire des naufrages et des morts sur mer.