Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 17, 1838.djvu/54

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en quittant l’Écosse ; de sorte que vous voyez, monsieur, que j’exerce une espèce de servitude en second ordre, étant le serviteur d’un serviteur. — Et quel est le nom de votre maître ? » demanda George : et remarquant que Richie hésitait, il ajouta : Ne me le dites pas pourtant si c’est un secret. — C’est un secret qu’il ne servirait à rien de garder, dit Richie ; seulement vous savez que nous autres Écossais nous avons le cœur trop fier pour exposer notre détresse devant témoins. Ce n’est pas que mon maître éprouve autre chose qu’un embarras momentané, monsieur, » ajouta-t-il en regardant les deux apprentis anglais, « ayant une somme considérable au trésor royal, c’est-à-dire, » continua-t-il tout bas à maître George, « que le roi lui doit des monceaux d’argent ; mais il paraît qu’il sera difficile de s’en faire payer. Mon maître est le jeune lord Glenvarloch. »

Maître George témoigna beaucoup de surprise à ce nom.

« Vous faites partie des gens du jeune lord Glenvarloch, et vous êtes dans un tel état ! — Oui, ma foi, et vous voyez en moi tout ce qu’il y a de gens, au moins pour le moment. Plût au ciel qu’il fût plus heureux que je ne le suis, quand je devrais, moi, rester dans le même état ! — J’ai vu son père, dit maître George, suivi de quatre gentilshommes et de dix laquais tout couverts de velours et de dentelles. Mon Dieu ! quels changements on voit dans ce monde ! heureusement qu’il y en a un meilleur après lui. L’illustre et ancienne maison de Glenvarloch, qui a servi son roi et son pays pendant cinq cents ans ! — Votre Honneur peut bien dire mille, reprit le serviteur. — Je dis ce que je sais être vrai, l’ami, » répondit le bourgeois de Londres, « et pas un mot de plus. Vous paraissez assez bien remis maintenant ; pouvez-vous marcher ? — Très-bien, monsieur, ce n’était qu’un étourdissement. J’ai été élevé à West-Port, et ma tête peut supporter un coup qui mettrait un bœuf à bas. — Où loge votre maître ? — Nous logeons pour le moment, n’en déplaise à Votre Honneur, dans une petite maison au bout d’une de ces ruelles qui descendent au bord de l’eau, chez un honnête homme nommé John Christie, qui tient une boutique de fromage et de chandelles, et qui fournit surtout les vaisseaux. Son père était de Dundee. Je ne me souviens pas du nom de la rue, mais c’est tout juste en face de la grande église, là-bas ; et Votre Honneur se souviendra que nous ne portons que notre nom de famille, Nigel Olifaunt tout court, parce que nous vivons dans la retraite en ce moment, car en