Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/257

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

core attachée à l’Église de Rome, dix fois plus odieuse aux gens de commerce depuis que sa croyance était devenue la marque distinctive de l’aristocratie hautaine de leurs voisins.

D’après le peu que Peveril recueillit ainsi des opinions du peuple de Liverpool, il jugea qu’il agirait prudemment en quittant cette ville le plus tôt possible et avant qu’on pût le soupçonner d’avoir des liaisons avec le parti qui paraissait être si odieux.

Mais, pour achever son voyage, il fallait qu’il achetât un cheval ; dans ce dessein, il résolut d’avoir recours aux écuries d’un maquignon bien connu à cette époque, et qui demeurait à l’une des extrémités de la ville : s’étant fait donner son adresse, il s’y rendit sur-le-champ.

Les écuries de Joe Bridlesley offraient un nombreux assemblage des meilleurs chevaux ; car ce commerce était alors beaucoup plus considérable qu’il ne l’est à présent. C’était une chose fort ordinaire dans ce temps-là que de voir un étranger acheter, pour un voyage seulement, un cheval qu’il revendait ensuite, quand il était arrivé au lieu de sa destination. Il résultait de cet usage des demandes continuelles, auxquelles les marchands étaient toujours en mesure de satisfaire ; et Bridlesley, ainsi que ses confrères, faisait probablement sur de tels marchés de très-gros bénéfices.

Julien, qui était assez bon connaisseur, choisit un cheval vigoureux et bien fait, d’environ seize palmes de hauteur, et le fit conduire dans la cour, afin de juger si son allure répondait à son extérieur. Tout paraissant lui convenir, il ne fut plus question que de régler le prix du coursier. Bridlesley, comme de raison, jura que son chaland avait choisi le meilleur cheval qui eût jamais passé la porte de ses écuries depuis qu’il s’était mis dans ce commerce ; et que désormais il était impossible de se procurer un cheval de cette espèce, attendu que la jument dont il provenait était morte ; puis il demanda un prix proportionné à cet éloge préparatoire : alors commencèrent les débats qui ont lieu d’ordinaire entre le vendeur et l’acheteur pour arriver à ce que les marchands français appellent un juste prix.

Si le lecteur n’est pas étranger à cette espèce de trafic, il sait qu’en général il donne lieu à une foule de quolibets et de jeux de mots, et qu’un marché de cette nature attire ordinairement un cercle d’oisifs toujours prêts à donner leur avis ou à offrir leur témoignage. Parmi eux se trouvait en cette occasion un homme