Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/259

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’étranger, affectant un air d’extrême dignité, tira de sa poche et mit entre les mains de Peveril un warrant signé par le président de la chambre des communes, autorisant Charles Topham, huissier de la verge noire, à poursuivre et arrêter certains individus désignés dans cet écrit, ainsi que toute autre personne qui était ou qui serait accusée par témoins compétents d’être fauteur et complice de la conspiration infernale et damnable des papistes, conspiration ourdie dans le sein même du royaume : l’écrit se terminait par la sommation faite à tout loyal et fidèle sujet de prêter sur-le-champ aide et assistance audit Charles Topham dans l’exécution de son mandat.

À la lecture d’une pièce aussi importante, Julien n’hésita plus à céder son cheval à ce redoutable fonctionnaire, qu’on a comparé à un bon que la chambre des communes devait nourrir de mandats d’arrêt, puisqu’elle voulait conserver un tel animal ; en sorte que les mots « Attrape-le, Topham » devinrent un proverbe et un proverbe terrible dans la bouche du peuple.

La condescendance de Peveril envers l’émissaire lui valut les bonnes grâces de ce dernier, qui, avant de choisir des chevaux pour les gens de sa suite, permit à Julien de s’arranger d’un cheval gris, bien inférieur, il est vrai, à celui qu’il venait de céder, mais dont le prix était un peu plus modéré, quoiqu’il fût encore très-élevé ; car l’honnête Bridlesley, voyant qu’on lui demandait des chevaux pour les communes d’Angleterre, avait pris tout-à-coup la résolution tacite d’augmenter de vingt pour cent la valeur de toute son écurie.

Peveril convint du prix et paya cette fois sans s’amuser à marchander, car, pour parler clairement, il avait vu dans le mandat de M. Topham le nom de son père, sir Geoffrey Peveril de Martindale-Castle, comme étant l’un des individus qui devaient être arrêtés.

Julien n’avait donc rien de plus pressé que de quitter Liverpool sur-le-champ, et de voler dans le Derbyshire pour y donner l’alarme, si toutefois il y arrivait avant que M. Topham eût exécuté l’ordre qu’il avait reçu, ce qui ne paraissait pas vraisemblable, car naturellement il devait commencer par s’assurer de ceux qui vivaient dans le voisinage des ports de mer. Quelques mots qu’il entendit le confirmèrent dans cette opinion.

« Écoutez bien, l’ami, dit M. Topham : vous ferez conduire ces chevaux dans deux heures à la porte de M. Shortell, marchand