Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/537

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ont été rejetées. — Démons et enfer ! coquin, » s’écria le duc en se levant et en le saisissant au collet, « Qui vous a dit tout cela ? — Lâchez d’abord mon habit, milord duc, et je vous répondrai ensuite : j’ai gardé quelque chose de la vieille humeur puritaine, et je ne puis souffrir l’imposition des mains. Encore une fois, laissez mon collet, ou je trouverai bien moyen de vous y contraindre. »

Le duc, qui avait porté la main droite à son poignard, tandis que de la gauche il tenait Christian au collet, finit par le lâcher, mais lentement et en homme qui suspend plutôt qu’il n’abandonne l’exécution d’un projet formé avec précipitation. Christian, rajustant son collet avec un calme parfait, dit : « À la bonne heure ! maintenant que mon habit est dégagé, nous pourrons causer sur le pied de l’égalité. Je ne viens pas insulter Votre Grâce, mais lui offrir vengeance de l’affront qu’elle a reçu. — Vengeance ! c’est l’offre la plus précieuse qu’on puisse me faire dans ma situation d’esprit actuelle. J’ai faim de vengeance, j’ai soif de vengeance, je mourrais pour assouvir ma vengeance !… Corbleu ! » continua-t-il en se promenant de long en large dans l’appartement avec l’agitation la plus violente et la moins déguisée, « j’avais chassé ce refus de ma tête en m’occupant de mille bagatelles, parce que je pensais qu’il n’était connu de personne : mais il est connu ; tu le connais, toi véritable égout des secrets de la cour : l’honneur de Williers est actuellement entre tes mains, Ned Christian ! Parle, homme d’intrigue et d’astuce ! contre qui me promets-tu vengeance ? Parle, et si ta réponse vient s’accorder avec mon désir, je ferai un marché avec toi aussi volontiers qu’avec ton maître, satan lui-même. — Je ne serai pas aussi déraisonnable dans mes conditions que l’est, à ce qu’on nous conte, le vieil apostat. J’offrirai à Votre Grâce, comme le pourrait faire satan, la félicité temporelle et la vengeance, car telle est la monnaie qu’il emploie souvent pour gagner des recrues ; mais je vous laisse le soin de pourvoir, comme vous l’entendrez, à votre salut futur. »

Le duc, le regardant d’un œil fixe et triste, répliqua : « Plût à Dieu, Christian, que je pusse lire sur ta physionomie quel projet de damnable scélératesse tu as à me proposer, sans qu’il te fût besoin de recourir à des paroles ! — Votre Grâce peut essayer, » dit Christian en souriant d’un air calme.

« Non, » répliqua le duc, après l’avoir encore considéré l’espace