Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/546

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Portsmouth et de Cleveland, ainsi que d’autres femmes qui avaient la réputation, quoique la chose fût moins notoire, d’avoir été favorites royales. Toute contrainte était bannie d’un cercle ainsi composé, où se réunissaient aussi les courtisans sinon les plus sages, du moins les plus spirituels qui se trouvèrent jamais rassemblés autour d’un monarque : comme ils avaient partagé les besoins, les plaisirs et les fredaines de son exil, ils jouissaient ainsi d’une espèce de licence passée en usage, que l’excellent prince, arrivé à l’époque de sa prospérité, aurait eu bien de la peine à réprimer, s’il eût été dans son caractère de l’entreprendre. Mais c’était là la dernière des pensées de Charles : ses manières étaient assez nobles pour empêcher qu’on lui manquât d’égards, et il ne cherchait d’autre protection contre une excessive familiarité que celle qu’il devait à sa dignité et à la vivacité de son esprit.

Dans l’occasion dont il s’agit il était particulièrement disposé à jouir de la scène de plaisir qui avait été préparée. La mort singulière du major Coleby, qui avait eu lieu en sa présence et qui avait proclamé à ses oreilles, comme le son momentané d’une cloche, sa négligence et son ingratitude envers un homme qui lui avait tout sacrifié, causa beaucoup de chagrin à Charles ; mais, dans sa propre opinion du moins, il avait complètement expié ce coupable abandon par les peines qu’il s’était données pour intervenir en faveur de sir Geoffrey Peveril et de son fils, dont il considérait la délivrance comme une excellente action en elle-même, et, en dépit des graves circonstances d’Ormond, comme effectuée d’une manière bien pardonnable, vu les difficultés qui l’environnaient. Il éprouva même une certaine satisfaction en apprenant qu’il y avait eu des troubles dans les rues de la Cité, et qu’un certain nombre des plus violents fanatiques s’étaient rendus à leurs lieux de réunion, convoqués extraordinairement pour s’enquérir, comme disaient leurs prédicateurs, des causes de la céleste colère et de la marche rétrograde de la cour, pour examiner la conduite des hommes de loi et des jurés par qui les infâmes et sanguinaires fauteurs du complot papiste avaient été soustraits aux châtiments qu’ils avaient le plus mérités.

Le roi, nous le répétons, semblait écouter ces renseignements avec plaisir, même quand on lui rappelait le caractère dangereux et jaloux des hommes qui travaillaient à répandre de tels soupçons. « Qui osera maintenant m’accuser, » disait-il avec un air de