Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/67

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signes et le mouvement de leurs verres, qu’ils éprouvaient tous en commun le même plaisir, et qu’ils le trouvaient rehaussé par la certitude de le partager avec leurs voisins et leurs amis. La religion, comme le principal objet de leurs pensées, devint aussi celui de leur conversation, et, partagés bientôt en plusieurs groupes, ils discutèrent divers points de doctrine et de métaphysique, pesèrent le mérite de différents prédicateurs, comparèrent les articles de foi de différentes sectes, et citèrent l’Écriture à l’appui de celle qu’ils favorisaient.

Ces débats donnèrent lieu à quelques contestations qui auraient peut-être été plus loin que la bienséance ne le permettait, sans l’intervention prudente du major Bridgenorth. Il étouffa également à sa naissance une querelle qui s’élevait entre Gaffer Hodgeson de Charnelycot et le révérend M. Solsgrace, sur la question délicate de savoir s’il était permis à chacun de prêcher comme s’il était ministre ; et le major ne jugea ni prudent ni convenable de céder au désir manifeste de quelques-uns des plus chauds enthousiastes de l’assemblée, qui étaient fort disposés à donner aux assistants une idée du talent particulier qu’ils avaient reçu du ciel pour improviser des exhortations et des prières.

Ces absurdités, nées de l’hypocrisie ou de l’enthousiasme, appartenaient au temps ; et, bien que le major dût y être soumis comme les autres, il eut assez de bon sens pour reconnaître qu’elles ne convenaient ni au lieu ni à la circonstance.

Ce fut encore par son influence que la compagnie se retira de bonne heure ; et il y avait déjà long-temps qu’ils avaient quitté le château, que les cavaliers n’avaient point encore donné le dernier essor à leur joviale folie. Cette retraite causa la plus vive satisfaction à lady Peveril ; elle redoutait les conséquences fâcheuses qui auraient peut-être eu lieu, si les deux compagnies, se retirant au même moment, étaient venues à se rencontrer.

Il était près de minuit lorsque la plus grande partie des cavaliers, c’est-à-dire ceux qui furent en état de partir sans le secours de personne, reprirent le chemin du village de Martindale-Moultrassie, à la clarté d’une pleine lune propre à favoriser leur retraite et à prévenir toute espèce d’accident. Leurs cris de joie et le refrain qu’ils chantaient tous en chœur :

Le roi reprendra sa couronne,


furent entendus avec un plaisir réel par lady Peveril, qui se félicitait de ce que la fête s’était terminée sans aucun événement fâ-