Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/190

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l’heureux époux de la comtesse Isabelle, si le Sanglier des Ardennes vous paraît digne d’elle. De la Marck ! mais, Sire, il est connu pour le plus fameux brigand et le plus cruel assassin de toutes nos frontières… il a été excommunié par le pape pour mille crimes. — Nous le ferons absoudre, ami Olivier ; l’Église est miséricordieuse. — C’est presque un proscrit ; il a été mis au ban de l’Empire par un rescrit de la diète de Ratisbonne. — Nous ferons lever le ban, ami Olivier, la chambre impériale entendra raison. — En admettant qu’il soit d’une illustre naissance, il a les manières, la figure, l’extérieur aussi bien que le cœur d’un boucher flamand. Elle ne l’acceptera jamais. — Si je le connais bien, sa manière de faire la cour permettra difficilement à la comtesse de faire un autre choix. — Certes, j’avais grand tort, Sire, lorsque j’accusais Votre Majesté d’être trop scrupuleuse. Sur ma vie les crimes d’Adolphe sont des vertus auprès de ceux de de la Marck ! Et d’ailleurs, comment lui sera-t-il possible de venir au-devant de sa future épouse ? Votre Majesté sait bien qu’il n’ose pas s’éloigner beaucoup de sa forêt des Ardennes. — C’est à quoi il faut songer. D’abord il s’agit d’informer les deux dames qu’elles ne peuvent rester plus long-temps dans notre cour sans occasionner une guerre entre la France et la Bourgogne, et que, ne voulant pas les remettre au pouvoir de notre beau cousin Charles, je désire qu’elles quittent en secret notre territoire. — Elles demandent à être transportées en Angleterre ; et nous les verrons revenir avec un lord de cette île, à belle figure ronde, à longs cheveux bruns, marchant à la tête de trois mille archers. — Non !… non !… nous n’oserions, vous m’entendez, offenser notre beau cousin de Bourgogne au point de leur permettre de passer en Angleterre ; ce serait exciter son mécontentement avec autant de certitude que si nous les gardions ici. Non, non… ce n’est que sous la protection de l’Église que nous pouvons sans danger remettre la comtesse. Tout ce que je puis faire, c’est de fermer les yeux sur le départ des dames Hameline et Isabelle de Croye, déguisées, et avec une suite peu nombreuse, pour se réfugier auprès de l’évêque de Liège, qui, pour le moment, placera la belle Isabelle sous la sauvegarde d’un couvent. — Et si ce couvent la protège contre Guillaume de la Marck quand il connaîtra les bonnes intentions de Votre Majesté, je ne connais pas mon homme, dit Olivier. — À la vérité, répondit le roi, grâce aux secours d’argent que je lui fais passer en secret, de la Marck a rassemblé une jolie troupe de soldats aussi