Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/230

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esprit ne peut alléger les chaînes qui pèsent sur vos membres. — C’est un mal qui peut s’endurer pendant quelque temps, et si je ne parviens bientôt à m’échapper, ou si mes camarades ne peuvent m’y aider, je puis toujours mourir : la mort est la liberté la plus parfaite. »

Il y eut un intervalle de silence qui dura quelque temps. Quentin le rompit en reprenant ses questions :

— « Votre race est une race vagabonde, inconnue aux nations de l’Europe. D’où tire-t-elle son origine ? — Je ne saurais vous le dire, répondit le Bohémien. — Quand délivrera-t-elle ce royaume de sa présence pour retourner dans le pays d’où elle est venue ? — Lorsque le temps de son pèlerinage sera accompli. — Ne descendez-vous pas de ces tribus d’Israël qui furent emmenées en captivité au-delà du grand fleuve de l’Euphrate ? » lui demanda Quentin, qui n’avait pas oublié ce qu’on lui avait enseigné à Aberbrothock. — S’il en eût été ainsi, nous aurions suivi leur foi, pratiqué leurs rites. — Quel est ton nom, à toi ? — Mon véritable nom n’est connu que de mes frères ; les étrangers, ceux qui ne vivent pas sous nos tentes, m’appellent Hayraddin Maugrabin, c’est-à-dire Hayraddin le More africain. — Tu t’exprimes trop bien pour un homme qui as toujours vécu dans ta misérable horde. — J’ai appris quelque chose de la science de ce pays. Lorsque j’étais encore enfant, notre tribu fut poursuivie par des chasseurs de chair humaine. Une flèche traversa la tête de ma mère, et elle mourut. J’étais embarrassé dans la couverture de laine qui couvrait ses épaules, et je fus pris par les chasseurs. Un prêtre me demanda aux archers du prévôt, il m’obtint, et m’instruisit dans les sciences franques pendant deux ou trois ans. — Comment et pourquoi l’as-tu quitté ? — Je lui avais volé de l’argent, même le dieu qu’il adorait, » répondit Hayraddin avec un calme parfait. « Il me découvrit et me battit. Je le perçai de mon couteau ; je m’enfuis dans les bois, et je me trouvai de nouveau réuni à mon peuple. — Misérable ! tu as assassiné ton bienfaiteur ? — Que m’importaient ses bienfaits ? Le jeune Zingaro n’était pas un chien domestique pour marcher sur les pas de son maître et ramper sous ses coups pour obtenir les bribes de sa table. C’était le jeune loup mis en captivité : à la première occasion, il a rompu sa chaîne, a déchiré son maître, et est retourné dans ses déserts. »

Il se fit une nouvelle pause, après laquelle le jeune Écossais, dans l’intention de pénétrer plus avant dans le caractère de ce