Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/265

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l’officieux vieillard tout désir de l’accompagner plus loin que le pont-levis. Au bout de quelques minutes, Quentin se trouva dans l’enceinte des murs de Liège, ville qui était alors l’une des plus riches de la Flandre, et par conséquent du monde entier.

La mélancolie, et même la mélancolie d’amour, ne s’empare pas aussi profondément de l’esprit, surtout de celui de l’homme, que les âmes tendres et enthousiastes sont disposées à le croire. Elle cède aux impressions frappantes et subites produites sur les sens par l’aspect de lieux inconnus, par des scènes qui créent une nouvelle série d’idées, et par le spectacle du mouvement continuel et de l’activité d’une grande ville. Au bout de quelques instants, l’attention de Quentin fut captivée aussi complètement par la variété des objets qui s’offraient successivement à lui dans les rues de Liège, que s’il n’eût existé dans le monde entier ni comtesse Isabelle ni Bohémien.

Les rues immenses, quoique sombres et étroites ; l’élévation des maisons ; l’étalage brillant des plus riches marchandises et des plus magnifiques armures ; le nombre et l’éclat des magasins et des boutiques ; la foule de citoyens affairés, de toutes conditions, qui passaient et repassaient avec un air de préoccupation, d’importance ou d’empressement ; les énormes chariots qui transportaient çà et là les objets d’exportation et d’importation, tels que des draps, de la serge, des armes de toute espèce, des clous, du fer, et divers autres articles de nécessité ou de luxe, les uns destinés à être consommés dans une ville opulente, les autres à être échangés contre d’autres marchandises, ou à être transportés ailleurs : tous ces objets réunis formaient un tableau d’activité, de richesse et de splendeur auquel Quentin avait été étranger jusqu’alors. Il admirait aussi les nombreux canaux ouverts pour communiquer avec la Meuse, et qui, traversant la ville en sens divers, offraient au commerce, dans tous les quartiers, les facilités du transport par eau. Enfin, lorsqu’il eut visité et regardé tout ce qui lui parut le plus digne d’intérêt, il entra pour entendre une messe dans la vieille et vénérable église de Saint-Lambert, fondée, dit-on, dans le huitième siècle.

Ce fut en sortant de ce lieu consacré à la religion que Quentin commença à remarquer qu’après avoir examiné tout ce qui l’entourait avec une curiosité que rien ne le forçait à réprimer, il était devenu, à son tour, l’objet de l’attention de plusieurs groupes de bons bourgeois qui paraissaient occupés à l’examiner de-