Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/345

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vraient les anciennes murailles de la petite ville de Péronne la Pucelle, ainsi que les vastes prairies dont la verdure contrastait avec la blancheur des tentes de l’armée de Bourgogne, forte d’environ quinze mille hommes.


CHAPITRE XXVI.

L’ENTREVUE.


Lorsque les potentats se réunissent, les astronomes peuvent regarder cet événement comme un présage funeste qui ressemble à la conjonction de Mars et de Saturne.
Vieille Comédie.


Il serait difficile de dire positivement si c’est un privilège ou un inconvénient attaché à la souveraineté que, dans les relations qui existent entre eux, les princes soient contraints, par le respect qu’eux-mêmes doivent avoir pour leur rang et leur dignité, à régler leurs sentiments et leurs discours d’après les lois d’une étiquette sévère qui leur interdit toute manifestation d’émotion un peu vive. Cette conduite pourrait avec raison passer pour une profonde dissimulation, s’il n’était pas généralement reconnu qu’elle n’est qu’un pur cérémonial consacré par l’usage. Il n’est pourtant pas moins certain que, lorsqu’ils s’affranchissent de ces lois de l’étiquette pour permettre à leurs passions haineuses de s’exhaler librement, ils compromettent leur dignité aux yeux du public, ce qui a toujours des conséquences fâcheuses : c’est ce que firent deux illustres rivaux, François Ier et l’empereur Charles-Quint, qui, s’étant donné un démenti réciproque, voulurent vider leur querelle par un combat singulier.

Charles de Bourgogne, le plus impatient, le plus impétueux et, pour tout dire en un mot, le plus imprudent des princes de son siècle, se trouva cependant enfermé malgré lui dans un cercle magique, tracé par la déférence qu’il devait à Louis comme à son suzerain et à son seigneur lige qui daignait l’honorer, lui vassal de la couronne, de sa royale visite. Revêtu de son manteau ducal, et accompagné de ses grands officiers, des principaux seigneurs et chevaliers qui formaient autour de lui une brillante cavalcade, il marcha à la rencontre de Louis XI. Toute cette suite resplendissait d’or et d’argent, car les richesses de la cour d’Angleterre