Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/472

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purent à peine se servir de leurs armes pour se défendre, et la nuit, qui commençait à tomber, ajouta au désordre.

Lorsque le duc Charles reçut cette nouvelle, il fut saisi d’un transport de rage qui ne se calma que quand Louis lui eut offert d’envoyer ses hommes d’armes français au faubourg, afin de secourir l’avant-garde bourguignonne. Rejetant cette offre d’un ton sec, il voulait se mettre lui-même à la tête de ses gardes ; mais d’Hymbercourt et Crèvecœur le prièrent de leur confier ce service. Marchant donc vers le lieu du combat, sur deux points différents, en bon ordre et de manière à pouvoir se porter mutuellement secours, ces deux célèbres capitaines réussirent à repousser les Liégeois et à dégager l’avant-garde, qui, indépendamment des prisonniers, perdit plus de huit cents hommes, dont une centaine étaient des hommes d’armes. Les prisonniers ne furent pourtant pas en grand nombre, la plupart ayant été délivrés par d’Hymbercourt, qui, ayant réussi à se rendre maître du faubourg, établit des postes vis-à-vis de la ville, dont on était séparé par un espace découvert, d’environ huit à neuf cents pas, formant comme une esplanade : en effet, les maisons qui le couvraient naguère avaient été démolies dans la crainte qu’elles ne fussent un obstacle pour la défense du corps de la place. Il n’y avait pas de fossé entre Liège et le faubourg, le terrain étant trop pierreux pour qu’il eût été possible d’en ouvrir un. En face du faubourg se trouvait une porte par laquelle on pouvait faire des sorties, et deux ou trois des brèches que le duc Charles avait fait pratiquer dans les murailles, après la bataille de Saint-Tron, avaient été bouchées à la hâte par de simples palissades en bois. D’Hymbercourt fit tourner deux coulevrines contre la porte, en dirigea deux autres contre les brèches, afin d’être prêt à repousser ceux qui essaieraient de faire une sortie, puis alla rejoindre l’armée bourguignonne, qu’il trouva dans un grand désordre.

En effet, le corps principal et l’arrière-garde du duc avaient continué à avancer pendant que son avant-garde, repoussée et rompue, se retirait en désordre : ces fuyards vinrent heurter contre les autres troupes, et jeter la confusion jusque dans leurs rangs. L’absence de d’Hymbercourt, qui remplissait les fonctions de maréchal de camp, ou, comme nous le dirions aujourd’hui, de quartier-maître général, permit à la confusion de se propager ; et, pour que rien n’y manquât, la nuit devint aussi noire que la gueule d’un loup, une forte pluie tomba tout à coup. Enfin le sol