Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/151

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n’accomplissait pas davantage les autres cérémonies religieuses. Le chapelain, il est vrai, se déclarait fort satisfait de l’état de la conscience de l’étranger ; mais on a long-temps soupçonné que le digne ecclésiastique ne conservait ses faciles fonctions qu’à la condition très raisonnable d’approuver les principes et de certifier l’orthodoxie de tous les hôtes que le baron invitait à jouir de son hospitalité.

« On observa que Dannischemend était extrêmement rigide à remplir ses dévotions particulières, en se prosternant aux premiers rayons du soleil levant, et qu’il avait fabriqué une lampe d’argent dans les plus belles proportions, qu’il avait placée sur un piédestal représentant une colonne tronquée de marbre dont la base était couverte de signes hiéroglyphiques. Avec quelles essences en alimentait-il la flamme, c’était chose inconnue pour tout le monde, sauf peut-être pour le baron. Mais la flamme était plus vive, plus pure, plus brillante que toutes celles qu’on avait jamais vues, excepté celle du soleil lui-même, et l’on croyait généralement que Dannischemend en faisait l’objet de ses adorations en l’absence de cet astre sacré. On n’avait plus rien remarqué, sinon que ses mœurs semblaient sévères, sa gravité profonde, sa manière de vivre frugale, ses veilles et ses jeûnes très fréquents. Excepté dans des occasions particulières, il ne parlait à personne qu’au baron ; mais comme il avait une bourse bien garnie et qu’il était libéral, il était considéré par les domestiques avec respect, il est vrai, mais sans crainte ni répugnance.

« Le printemps avait succédé à l’hiver, l’été avait produit ses fleurs et l’automne ses fruits qui mûrissaient et mollissaient, lorsqu’un page qui les accompagnait quelquefois dans le laboratoire pour les aider manuellement au besoin, entendit le Persan dire au baron d’Arnheim : « Vous ferez bien, mon fils, de retenir mes paroles, car les leçons que je vous donne tirent à leur fin, et il n’existe pas de puissance sur terre capable de retarder plus longtemps ma destinée. — Hélas ! mon maître, répliqua le baron, faut-il donc que je perde l’avantage d’être dirigé par vous, au moment même où votre aide me devient si nécessaire pour me placer sur le pinacle même du temple de la Sagesse ? — Ne vous découragez pas, mon fils, répondit le sage ; je léguerai la tâche de vous perfectionner dans vos études à ma fille qui viendra ici tout exprès. Mais n’oubliez pas, si vous attachez du prix à la durée de votre famille, qu’il ne faut la regarder que comme un guide de vos études !