Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/192

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En parlant ainsi il pressa le ressort, et le couvercle s’ouvrant laissa voir un diamant remarquable par l’éclat et la grosseur, qui paraissait d’une valeur extraordinaire. Les yeux du cupide gouverneur, et de son domestique non moins rapace, furent tellement éblouis de cette splendeur merveilleuse que d’abord ils ne purent exprimer que la joie et la surprise.

« Ventrebleu ! oui, monseigneur, dit enfin Kilian, le vieil entêté avait bien ses raisons pour résister si fortement. Je me serais moi-même laissé disloquer un membre ou deux avant de livrer des brillants comme ceux-là…. mais maintenant, seigneur Archibald, votre fidèle serviteur peut-il vous demander comment ce butin sera partagé entre le duc et son gouverneur, relativement aux très louables coutumes des villes de garnison ? — Ma foi ! nous supposerons la garnison prise d’assaut, Kilian ; et dans un assaut, tu sais, le premier venu prend tout… toujours néanmoins sans oublier ses fidèles serviteurs. — Comme moi, par exemple, dit Kilian.

— Oui, et comme moi, par exemple aussi, » répliqua une voix qui résonna telle que l’écho des paroles de l’écuyer, au coin le plus éloigné de l’antique appartement.

« Corbleu ! nous sommes écoutés ! » s’écria le gouverneur en tressaillant et en mettant la main sur son poignard.

« Seulement par un fidèle serviteur, comme l’observait le digne écuyer, » dit l’exécuteur en s’avançant à pas lents.

« Vilain ! comment as-tu osé m’espionner ainsi ? » lui demanda le seigneur Archibald d’Hagenbach.

« Ne vous troublez point pour cela, monseigneur, dit Kilian. L’honnête Steinernherz n’a de langue pour parler et d’oreilles pour entendre que suivant votre bon plaisir… À coup sûr, nous eussions dû l’admettre aussitôt dans notre conseil, attendu qu’il va falloir expédier nos gens, et avec célérité. »

« Vraiment ! dit Hagenbach ; j’avais cru qu’ils pourraient être épargnés. — Oui, pour dire au duc de Bourgogne comment le gouverneur de La Ferette compte avec son trésorier relativement aux droits et aux confiscations de la douane ? — C’est vrai, répliqua le chevalier ; les morts n’ont ni dents ni langue… ils ne peuvent ni mordre ni raconter d’histoires. Tu les expédieras, exécuteur. — Oui, monseigneur, mais à condition que, si je dois les raccourcir dans le donjon, ce que j’appelle opérer dans les ténèbres, mon privilège de réclamer des titres de noblesse me sera maintenu et réservé, et l’exécution sera déclarée aussi valable pour mes droits