Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/241

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mencer ? — Mais, mon père, » répondit son fils avec une certaine chaleur, « en parlant ainsi vous ne considérez pas la différence de notre importance respective pour l’exécution du projet que vous avez depuis si long-temps conçu, et qui semble si près d’être accompli. Songez que je ne puis m’acquitter qu’imparfaitement de notre mission, sans connaître personnellement le duc, sans avoir aucun titre à sa confiance. Je pourrais bien répéter vos paroles, mais aucune circonstance ne viendrait en démontrer la véracité, et par conséquent ce dessein, à la réussite duquel vous avez consacré votre vie, et pour lequel vous êtes maintenant prêt à courir au devant de la mort, échouerait nécessairement avec moi ! — Vous ne pouvez ébranler ma résolution, ni me persuader que ma vie est plus précieuse que la vôtre. Vous me rappelez seulement que c’est vous, et non moi, qui devez être porteur de ce gage au duc de Bourgogne. Si vous réussissiez à parvenir jusqu’à sa cour ou à son camp, la possession de ces diamants vous serait nécessaire pour accréditer votre mission : c’est pourquoi ils me sont moins utiles à moi, qui pourrais réclamer à d’autres titres la confiance du prince, s’il plaisait au ciel de me laisser accomplir seul cette importante commission ; mais puisse Notre-Dame, dans sa miséricorde, faire qu’il en soit autrement ! N’oubliez donc pas que si vous aviez occasion de poursuivre votre route par l’autre rive du Rhin, il faudra diriger votre marche de telle sorte que vous puissiez revenir sur ce bord-ci à Strasbourg, où vous demanderez de mes nouvelles au Cerf-Volant, auberge de cette ville, que vous trouverez sans peine. Si vous n’entendez parler de moi à cet endroit, vous irez vers le duc et vous lui remettrez cet important paquet. »

Il glissa alors dans la main de son fils, avec autant de précaution que possible, la boîte qui contenait le collier de diamants.

« Les devoirs que vous avez en outre à remplir, » continua le vieux Philipson, « vous les connaissez bien ; seulement, je vous en conjure, que de vaines recherches sur mon destin ne vous empêchent pas d’accomplir la grande mission dont vous êtes chargé. Cependant préparez-vous à me dire adieu à l’instant, avec un cœur aussi résolu, aussi confiant que quand vous marchiez devant moi, et que vous dirigiez courageusement mes pas au milieu des précipices et des tempêtes de la Suisse. Le ciel alors était au dessus de nous, comme il y est encore à présent. Adieu, mon bien-aimé Arthur ! Si j’attendais jusqu’au moment même de notre séparation, je