Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/331

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nous devrions le trouver prêt à nous secourir, mes amis d’Angleterre sont résolus à ne pas tirer l’épée sans hommes et sans argent fournis par le duc de Bourgogne. — C’est une crainte, mais non la pire de toutes. Je redoute davantage la politique de Louis qui, à moins que mes espions ne m’aient grossièrement trompée, a déjà même proposé une paix secrète à Édouard, lui offrant des sommes considérables pour acheter l’Angleterre des Yorkistes et conclure une trêve de sept ans. — Impossible !… aucun Anglais commandant une armée semblable à celle que conduit actuellement Édouard n’oserait, ne fût-ce que par honte, sortir de France, sans avoir fait une courageuse tentative pour recouvrer ses provinces perdues. — Telles auraient été les pensées d’un prince légitime, dit Marguerite, qui eût laissé derrière lui un royaume obéissant et fidèle ; telles ne peuvent être les pensées de cet Édouard, mal nommé Plantagenet, vil peut-être d’esprit comme de naissance, puisque son véritable père fut, dit-on, un Blackburn, un archer de Middleham… usurpateur du moins, sinon bâtard[1]… telles ne seront pas ses pensées. Chaque brise qui souffle d’Angleterre apportera avec elle des craintes de défection parmi les sujets sur lesquels il exerce sa puissance usurpée ; il ne dormira point en paix, qu’il ne retourne en Angleterre avec ses coupe-gorges, grâce auxquels il espère défendre la couronne qu’il a volée. Il ne s’engagera jamais en guerre avec Louis, car Louis n’hésitera point à flatter son orgueil en s’humiliant… à gorger son avarice et à nourrir sa voluptueuse prodigalité avec des sommes d’or ; et je crains beaucoup que nous n’entendions bientôt dire que l’armée anglaise se retire de France avec la vaine vanterie d’avoir déployé ses bannières une fois de plus, pour une semaine ou deux, dans les provinces qui jadis leur appartenaient. — Nouveau motif pour nous de presser Bourgogne afin qu’il se décide ; et dans ce dessein je pars pour Dijon. Une armée aussi nombreuse que celle d’Édouard ne peut traverser ce détroit qu’en plusieurs semaines. Il est probable qu’elle passera l’hiver en France, quand même la trêve se conclurait avec le roi Louis. Avec mille lances du Hainaut rassemblées dans la partie orientale de la Flandre, je puis être bientôt dans le Nord où nous avons beaucoup d’amis, outre l’assurance du secours de l’Écosse. Le fidèle Occident se soulèvera au premier signal… on pourra trouver un Clifford, bien que les brouillards des montagnes l’aient dérobé aux

  1. Le parti de Lancastre jetait sur Édouard VI l’imputation de bâtardise, qui était totalement dénuée de fondement. a. m.