Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/344

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l’autre… Mais vous prenez un air grave, parce que je plaisante sur le caractère obstiné de ma malheureuse cousine. — Monseigneur, quels que soient, quels qu’aient été les défauts de ma maîtresse, elle est dans la détresse, et presque dans la désolation. Elle est ma souveraine, et en outre cousine de Votre Altesse. — Assez, seigneur comte, parlons sérieusement. Quoi que nous puissions penser de l’abdication du roi René, j’ai peur que nous n’ayons de la peine à faire voir les choses à Louis XI aussi favorablement que nous les voyons. Il soutiendra que le comté de Provence est un fief mâle, et que ni la renonciation de René ni le consentement de sa fille ne peuvent empêcher qu’il ne retourne à la couronne de France, puisque le roi de Sicile, comme on l’appelle, n’a point de descendants mâles. — Avec votre permission, ce sera une question à décider les armes à la main, et Votre Altesse a bravé Louis avec succès pour des motifs moins importants. Tout ce que je puis dire, c’est que si l’assistance active de Votre Grâce met le jeune comte de Richmond à même de réussir dans son entreprise, vous aurez le secours de trois mille archers anglais, lors même que le vieux John d’Oxford, faute d’un meilleur chef, devrait les commander en personne. — Noble secours dont le prix est doublé par l’homme qui promet de l’amener ! Votre assistance, illustre Oxford, me serait encore précieuse, ne vinssiez-vous qu’avec votre épée au côté, qu’avec un seul page à votre suite. Je connais votre tête et votre cœur. Mais n’en parlons plus ; les exilés, même les plus sages, ont le privilège de faire des promesses, et parfois… excusez-moi, noble Oxford… ils abusent leurs amis tout en s’abusant eux-mêmes : quelles sont les espérances d’après lesquelles vous m’excitez à m’embarquer encore sur un océan aussi orageux et aussi incertain que celui de vos dissensions civiles ? »

Le comte d’Oxford tira un papier et expliqua au duc le plan de son expédition qui devait être soutenue par une insurrection des partisans de Lancastre, et dont il nous suffira de dire qu’elle était d’une audace poussée jusqu’à la témérité, mais pourtant combinée si bien, et si long-temps mûrie, que, dans ces temps de révolutions rapides, et sous un chef d’une habileté militaire et d’une sagacité politique aussi reconnues, elle présentait une apparence réelle de succès.

Pendant que le duc Charles s’appesantissait sur les détails d’une entreprise séduisante et vraiment faite pour flatter son caractère… pendant qu’il comptait les affronts qu’il avait reçus de son beau-