Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/355

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ble, quoique secret ? Songez, noble prince, à la position où se trouve votre trône, quoiqu’il déploie encore toute la splendeur de la puissance, et conserve encore les fondements solides qui appartiennent à un si auguste édifice. Je dois, moi, l’ami de votre maison, dût ma franchise me coûter la vie, je dois vous dire que les Suisses menacent votre tête comme une avalanche, et que les associations secrètes travaillent sous vos pas comme les premières commotions d’un tremblement de terre qui se prépare. Ne provoquez pas la guerre, et la neige restera tranquille sur le flanc de la montagne… L’agitation des vapeurs souterraines sera assoupie ; mais un seul mot de défi, une seule étincelle d’indignation dédaigneuse peuvent changer leurs terreurs en actes d’agression. — Vous parlez, répliqua le duc, avec plus de crainte pour une bande de manants nus ou une troupe d’assassins nocturnes, que je ne vous en ai jamais vu montrer pour un véritable péril. Pourtant je ne mépriserai pas votre conseil… j’écouterai patiemment les envoyés suisses, et je ne laisserai pas voir, si je peux y parvenir, le mépris avec lequel je ne puis que regarder leur prétention à être traités comme états indépendants. Quant aux associations secrètes, je garderai le silence jusqu’à ce que les circonstances me donnent les moyens d’agir de concert avec l’empereur, la diète et les princes de l’empire, pour les chasser toutes à la fois de leurs terriers…. Hein, seigneur comte, n’est-ce pas bien dit ? — C’est bien pensé, monseigneur, mais peut-être malheureusement exprimé. Vous êtes dans une position où un mot entendu par un traître peut amener mort et ruine. — Je ne vois pas de traîtres autour de moi. Si je pensais qu’il s’en trouvât dans mon camp, j’aimerais mieux mourir tout de suite sous leurs coups que de vivre dans un état perpétuel de terreur et de soupçon. — Les anciens camarades et serviteurs de Votre Altesse pensent défavorablement du comte de Campo-Basso qui tient un si haut rang dans votre confiance. — Oui, » répliqua le duc avec calme, « il est facile de décrier le plus fidèle serviteur dans une cour en lui opposant la haine unanime de tous les autres. Je gage que votre obstiné compatriote Colvin aura médit du comte autant que des autres, car Campo-Basso ne remarque aucune négligence dans aucun service, qu’il ne la dénonce sans crainte ni espoir de faveur. Et puis ses opinions sont tellement jetées dans le même moule que les miennes, que je ne l’amène jamais qu’avec peine à s’expliquer sur ce qu’il comprend mieux, lorsque nos idées viennent à différer sous quelque rapport. Ajoutez à cela noblesse, grâce,