Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/357

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il quitta la tente.

« Vous venez de voir, dit le comte d’Oxford à son fils, une esquisse de ce prince extraordinaire, tracée par lui-même. Il est facile d’enflammer son ambition ou sa soif de pouvoir, mais presque impossible de la restreindre dans les justes bornes où elle doit probablement s’arrêter. Il est toujours comme le jeune archer qui perd le but, en voyant une hirondelle lui passer devant les yeux, même lorsqu’il tend sa corde. Tantôt soupçonneux à l’excès et sans raison… tantôt prodigue de sa confiance sans réserve… ennemi naguère de la maison de Lancastre, et allié de son terrible adversaire… maintenant, dernier espoir, unique soutien de cette maison. Dieu arrange tout pour le mieux !… Il est cruel de voir jouer la partie, de voir même comment on la pourrait gagner, quand un caprice des autres nous empêche de recourir à notre propre adresse. Combien tout dépend de la décision que va prendre demain Charles, et combien je suis peu à même de l’influencer, soit pour sa propre sûreté, soit pour notre avantage ! Bon soir, mon fils ; abandonnons les événements à celui qui seul peut les conduire. »

CHAPITRE XXVII.

LA DÉPUTATION.

Mon sang a été trop froid et trop calmé ; il n’a pu s’échauffer à ces insultes, et vous l’avez bien senti, car vous avez mis, en conséquence, ma patience à contribution.
Shakspeare, Henri IV.

L’aurore matinale éveilla le compte d’Oxford banni et son fils, et sa lumière commençait à peine à se répandre dans l’orient, lorsque leur hôte Colvin entra avec un domestique portant des malles qu’il déposa à l’entrée de la tente, et se retira sur-le-champ. L’officier d’ordonnance du duc annonça alors qu’il venait avec un message du duc de Bourgogne.

« Son Altesse, dit-il, a envoyé quatre hommes robustes avec des lettres de créance pour mon jeune maître d’Oxford, et une ample bourse d’or pour subvenir à ses dépenses durant le voyage, et pendant que ses affaires pourront le retenir à Aix. J’apporte aussi un billet pour le roi René, afin d’assurer une bonne réception au jeune homme, et deux habits d’honneur pour son usage, qui ne nuiront