Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/370

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que faisaient courir à sa simplicité et à sa vertueuse indifférence pour les richesses l’introduction du luxe étranger et l’invasion des maux qui accompagnent la conquête.

Connaissant bien les opinions de Biederman, Oxford put aisément expliquer cet abattement du laudamman, tandis que son camarade Bonsttten, moins capable de comprendre les sentiments qui animaient son ami, le regardait avec l’expression qu’on peut voir dans la physionomie d’un chien fidèle, lorsque l’animal indique sa sympathie pour le chagrin de son maître, quoiqu’incapable d’en deviner ou d’en apprécier la cause. Son regard d’étonnement était promené de temps à autre sur la brillante assemblée, et par tous les individus qui formaient le groupe déconcerté, à l’exception de Donnerhugel et du landamman ; car l’indomptable orgueil de l’un et le ferme patriotisme de l’autre ne pouvaient pas, même un instant, être détournés par les objets extérieurs de leurs profondes et sérieuses réflexions.

Après un silence d’environ cinq minutes, le duc parla avec le ton hautain et dur qu’il croyait convenir à sa dignité, mais qui n’était réellement que l’expression de son caractère.

« Hommes de Berne, de Schwitz et de tout autre hameau ou désert que vous pouvez représenter, sachez que nous ne vous aurions pas honorés, rebelles que vous êtes à l’autorité de vos supérieurs légitimes, d’une audience solennelle, sans l’intercession d’un ami que j’estime, qui a séjourné dans vos montagnes, et que vous pouvez connaître sous le nom de Philipson, Anglais, suivant la profession de marchand, et chargé de certaines marchandises précieuses qu’il apportait à notre cour. Nous avons si complètement accédé à ses prières, qu’au lieu de vous envoyer tout de suite, comme vous le méritiez, au gibet et à la roue sur la place de Morimont, nous avons poussé la condescendance jusqu’à vous recevoir en notre présence, siégeant en cour plénière, à l’effet d’entendre la justification que vous avez à offrir pour l’insultante prise d’assaut de notre ville de La Ferette, pour l’assassinat d’un si grand nombre de nos sujets, et pour le meurtre audacieux du noble chevalier Archibald d’Hagenbach, exécuté en votre présence, à votre instigation et avec votre appui. Parlez… si vous pouvez dire quelque chose pour excuser votre félonie et votre trahison, ou pour détourner un juste châtiment, et solliciter un pardon que vous ne méritez pas. »

Le landamman sembla vouloir répondre ; mais Rudolphe Donnerhugel, avec la témérité et la hardiesse qui le caractérisaient, se