Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/380

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les yeux d’un rival aussi dangereux que Louis de France, qui certainement soutiendrait les ennemis du duc sous main, s’il ne se joignait pas à eux ouvertement. Sur ce point la résolution du duc était inébranlable. « On ne dira jamais de moi, répliqua-t-il, qu’après avoir prononcé des menaces, je n’ai pas osé les exécuter. Ces rustres m’ont déclaré la guerre, et ils apprendront quelle colère ils ont témérairement provoquée ; mais cependant je ne renonce pas à ton projet, mon cher Oxford. Si tu peux toujours m’obtenir cette cession de la Provence, et persuader au vieux René d’abandonner la cause de son petit-fils, Ferrand de Vaudemont, en Lorraine, tu mériteras ainsi que je t’envoie un redoutable secours contre mon frère Blackburn, qui, pendant qu’il boit des santés et s’enivre en France, peut bien venir à perdre ses domaines en Angleterre. Et ne t’impatiente pas s’il m’est impossible d’envoyer en ce moment même des hommes par delà le détroit. La marche que je vais faire sur Neufchâtel, qui est, je crois, le point le plus proche où je trouverai ces manants, sera comme une excursion du matin. J’espère que vous viendrez avec nous, mon vieux compagnon ; j’aimerais à voir si vous avez oublié dans ces montagnes comment se manie un cheval et se tient une lance en arrêt. — J’accompagnerai Votre Altesse, répondit le comte, ainsi que mon devoir me l’ordonne, car ma conduite est soumise à votre volonté. Mais je ne porterai pas d’armes, surtout contre ces peuples de l’Helvétie qui m’ont donné l’hospitalité, sauf pour ma défense personnelle. — Eh bien ! soit, répliqua le duc ; nous aurons en vous un excellent juge pour nous dire qui remplit le mieux son devoir contre ces rustres de montagnards. »

À cet endroit de la conversation, on frappa à la porte du pavillon, et le chancelier de Bourgogne entra aussitôt en grande hâte, et avec un air de vive inquiétude : « Des nouvelles, monseigneur, des nouvelles de France et d’Angleterre, » dit le prélat ; puis remarquant la présence de l’étranger, il observa le duc et garda le silence.

« C’est un fidèle ami, seigneur évêque, dit le duc ; vous pouvez me communiquer vos nouvelles devant lui. — Elles seront bientôt généralement connues, reprit le chancelier… Louis et Édouard sont complètement d’accord. » Le duc et le comte anglais tressaillirent.

« Je m’y attendais, dit le duc, mais pas sitôt. — Les rois se sont rencontrés, répliqua son ministre. — Comment… dans une ba-