Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/443

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toutes les personnes qui avaient accompagné le convoi s’étaient retirées, que le père et le fils demeuraient encore dans un lugubre silence près des restes de leur souveraine. Le clergé s’approcha enfin, et leur annonça qu’il allait remplir les dernières formalités en emportant le corps, qui avait été naguère occupé et animé par une âme si hautaine et si remuante, pour le livrer à la poussière, aux ténèbres et au silence du souterrain où la longue suite des comtes de Provence attendaient leur dissolution. Six prêtres prirent la bière sur leurs épaules ; d’autres portaient de grands cierges devant et derrière le corps, pendant qu’on le descendait par un escalier particulier qui ouvrait au milieu du pavé pour qu’on pénétrât dans le caveau. Les dernières notes du Requiem que les desservants de l’église avaient chanté en chœur s’étaient éteintes sous les longues et sombres arcades de la cathédrale, le dernier rayon de lumière qui s’échappait de l’ouverture du souterrain avait lui et disparu, lorsque le comte d’Oxford, prenant son fils par le bras, le conduisit en silence dans une petite cour fermée derrière l’édifice, où ils se trouvèrent seuls. Ils restèrent silencieux quelques minutes, car tous deux, et en particulier le père, étaient vivement affectés. À la fin le comte parla.

« Et c’est donc là sa fin ! dit-il… Ici, majesté, tombent avec ton trépas tous les plans que nous avions formés, que nous devions accomplir au péril de nos jours ! Cette âme résolue, cette tête politique, tout a cessé d’être ! Et que sert que les membres de l’entreprise aient encore mouvement et vie ? Hélas, Marguerite d’Anjou, puisse le Ciel récompenser tes vertus, et t’absoudre des conséquences de tes erreurs ! Tes qualités et tes défauts appartenaient à ton rang ; et si tu as navigué trop fière dans la mer des prospérités, jamais ne vécut princesse qui défia plus hardiment les tempêtes de l’adversité, qui les supporta avec autant d’intrépidité, de noblesse et de détermination. Ce dénoûment a terminé le drame, et nos rôles, mon fils, sont finis. — Il nous faut alors porter les armes contre les infidèles, mon père, » dit Arthur avec un soupir qui cependant fut trop faible pour être entendu.

« Non, répondit le comte, pas avant que j’apprenne qu’Henri de Richemond, incontestable héritier de la maison de Lancastre, n’a pas besoin de mes services. Grâce à ces bijoux dont votre lettre fait mention, si étrangement perdus et retrouvés, je puis lui procurer des ressources plus utiles que vos services ou les miens. Mais je ne retourne plus au camp du duc de Bourgogne ; de lui plus de