Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/483

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Il parut supporter la mort de son fils Rudiger avec une sombre résignation.

« Il aimait mieux, disait-il, que son fils fût tombé sur un champ de bataille, que le voir vivre pour mépriser la vieille simplicité de son pays, et croire que l’objet d’un combat était de remporter du butin. L’or du duc de Bourgogne mort, ajouta-t-il, nuira aux mœurs de la Suisse plus irréparablement que son épée, durant sa vie, n’avait nui à leurs corps. «

Le landamman déclara en outre que son frère l’avait averti qu’il était engagé dans une entreprise si périlleuse qu’il était presque certain d’y périr, et qu’il avait légué sa fille aux soins de son oncle, avec des instructions relatives à un établissement.

Ils se quittèrent alors ; mais bientôt après le landamman demanda avec anxiété au comte d’Oxford quelles étaient ses vues pour l’avenir et s’il pouvait les seconder.

« Je pense à choisir la Bretagne pour mon lieu de refuge, répondit le comte, car ma femme y demeure depuis que la bataille Tewkesbury nous a chassés d’Angleterre. — N’en faites rien, répliqua le bon landamman ; mais venez à Geierstein, avec la comtesse, et si elle peut, comme vous s’accoutumer à nos manières de montagnards, et à l’aspect de nos montagnes, vous serez aussi bien venus dans ma maison que chez un frère, en un séjour à jamais étranger aux conspirations et aux trahisons. Songez-y bien, le duc de Bretagne est un prince faible, entièrement gouverné par un misérable favori, Pierre Landais. Il est aussi capable je veux dire le ministre de vendre le sang des braves, qu’un boucher de vendre de la viande de bœuf ; et vous savez qu’il ne manque pas de gens, en France et en Bourgogne, qui ont soif du vôtre. »

Le comte d’Oxford lui témoigna ses remercîments d’une telle proposition, déclara qu’il en profiterait, si elle était approuvée par Henri de Lancastre, comte de Richmond, qu’il regardait alors comme son souverain.

Pour finir cette histoire, trois mois environ après la bataille de Nanci, l’illustre exilé, comte d’Oxford, reprit son nom de Philipson, amenant avec son épouse quelques restes de leur fortune première, qui les mirent à même d’acquérir une habitation commode près de Geierstein ; et le crédit du landamman dans le canton leur fit obtenir le droit de citoyen. La haute naissance et la médiocre fortune d’Anne de Geieistein et d’Arthur de Vere, jointes à leur inclination mutuelle, firent paraître leur union parfaitement assortie, et