Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/87

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maître dans l’art de manier son arme, avec les instructions de Bottaferma de Florence présentes à son souvenir, avec un cœur léger, une bonne lame, une main ferme et une juste cause, peut bien ne pas envier à son antagoniste l’avantage de deux pieds d’acier. »

Faisant ces réflexions, gravant dans son esprit, aussi bien que le temps le lui permettait, toutes les circonstances de localité qui pouvaient être avantageuses dans le combat, et prenant ensuite position au milieu de la cour où le terrain était entièrement libre, il jeta son manteau et dégaina.

Rudolphe avait d’abord cru que son antagoniste étranger était un jeune homme efféminé, auquel il aurait ôté tout courage en faisant seulement tourner sa formidable épée ; mais l’attitude ferme et attentive que prit l’Anglais rappela au Suisse l’incommodité de son arme pesante, et il résolut prudemment d’éviter toute précipitation qui pourrait donner de l’avantage à un ennemi qui ne paraissait pas moins audacieux que vigilant. Il dégaina son énorme épée en la tirant par dessus son épaule gauche, opération qui demande un certain temps, et il aurait ainsi présenté un avantage formidable à son adversaire, si le sentiment de l’honneur avait permis à Arthur de commencer l’attaque avant que l’opération fût terminée. Cependant l’Anglais resta ferme jusqu’à ce que le Suisse, déployant sa brillante lame au soleil levant, eût fait quatre à cinq tours de moulinet, comme pour montrer son poids et l’agilité avec laquelle il la maniait… puis il se plaça fièrement à la portée de l’arme de son adversaire, tenant la sienne à deux mains, et l’avançant à quelque distance de son corps, la pointe tournée en l’air. L’Anglais, au contraire, prit son épée d’une main, et la plaça à hauteur de sa figure dans une position horizontale, de manière à être tout aussi prêt à frapper, à riposter et à parer.

« Frappe, Anglais ! » dit le Suisse après qu’ils se furent ainsi toisés l’un et l’autre une minute environ.

« L’épée la plus longue doit frapper la première, — répondit Arthur ; et ces paroles n’étaient pas plutôt sorties de sa bouche, que l’épée suisse s’éleva et redescendit avec une rapidité qui, vu la pesanteur et la dimension de l’arme, paraissait de mauvais augure. Aucune passe, si habilement qu’elle eût pu être faite, n’eût paré ni ralenti la chute fatale de cette arme terrible, par laquelle le champion de Berne avait espéré tout à la fois commencer et finir le combat. Mais le jeune Philipson n’avait estimé qu’à leur véritable valeur la justesse de son regard et l’agilité de ses membres. Avant