Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/90

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querelleur ; et vous, mon digne hôte, vous pouvez être sûr que, quand un Suisse déclare une querelle finie, il n’y a pas moyen qu’elle recommence. Nous ne ressemblons pas aux hommes des vallées de l’Est, qui nourrissent la vengeance comme si c’était un enfant favori. Maintenant donnez-vous la main, mes enfants, et oublions cette sotte dispute. — Voici ma main, brave étranger, dit Donnerhugel ; tu m’as appris un coup d’escrime, et quand nous aurons pris le repas du matin, nous irons, si tu y consens, à la forêt, où je te montrerai eu retour une manière facile de prendre le gibier. Lorsque ton pied aura la demi-expérience de ta main, et que ton regard saura avoir une partie de la fermeté de ton cœur, tu ne trouveras guère de chasseurs qui te vaudront. »

Arthur, avec cette prompte confiance si naturelle à un jeune homme, embrassa aussitôt une proposition si franchement faite, et avant qu’ils regagnassent la maison, ils discutèrent ensemble sur diverses espèces d’amusements avec autant de cordialité que si leur bon accord mutuel n’avait pas été troublé.

« Maintenant les choses sont ce qu’elles doivent être, dit le landamman. Je suis toujours prêt à oublier la bouillante impétuosité de nos jeunes gens, pourvu qu’ils soient sincères et francs dans leur réconciliation, et qu’ils portent le cœur sur les lèvres, comme le doit un vrai Suisse. — Ces deux jeunes gens n’auraient néanmoins fait que de mauvaise besogne, dit Philipson, si vos soins, mon digne hôte, n’eussent découvert le rendez-vous, si vous ne m’eussiez pas appelé à votre secours pour rompre leurs projets. Puis-je vous demander comment la connaissance vous en est venue si à temps ? — Ce fut grâce aux avis de ma fée domestique, répondit Arnold Biederman, qui semble née pour le bonheur de ma famille… je veux dire ma nièce Anne, qui avait observé ces deux jeunes fanfarons échanger leurs gants et parler de Geierstein, de pointe du jour. Oh ! monsieur, c’est chose merveilleuse que la finesse d’esprit d’une femme ! Il se serait passé bien du temps avant qu’aucun de mes fils dépourvus de pénétration se fût montré si intelligent. — Il me semble apercevoir notre chère protectrice qui nous épie du haut de ce monticule, dit Philipson : mais on dirait qu’elle ne serait pas fâchée de nous observer sans être vue à son tour. — Oui, répliqua le landamman ; elle s’est mise en vedette pour voir s’il n’est rien arrivé de fâcheux ; et maintenant, j’en réponds, la pauvre enfant est toute honteuse d’avoir montré un si louable intérêt dans une affaire de ce genre. — J’éprouverai véritablement, dit l’Anglais,