Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 22, 1838.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

en troupes ; ou s’ils le font, ils ne viennent pas fondre en nuées sur un seul individu.

— Tu ne fais que nous rendre justice, » dit le Sarrasin, évidemment aussi satisfait de ce compliment qu’il avait été piqué du mépris qu’il avait cru voir dans la précédente bravade de l’Européen ; « tu n’as rien à craindre de nous, mais bien m’en a pris de n’avoir pas réussi à te tuer, portant comme tu le fais sur ta personne le sauf-conduit du roi des rois. Il est certain que la corde ou le sabre aurait vengé un tel crime sur la mienne.

— Je suis bien aise d’apprendre que son influence peut m’être si efficace, car j’ai entendu dire que la route est infestée de tribus d’Arabes voleurs, qui ne considèrent rien quand il s’agit d’une occasion de pillage.

— On t’a dit la vérité, brave chrétien, mais je te jure par le turban du Prophète que si tu venais à tomber entre les mains de ces brigands, j’entreprendrais moi-même de te venger à la tête de cinq cents cavaliers. Je tuerai tous les hommes jusqu’au dernier, et j’enverrai toutes les femmes en captivité dans de si lointains pays que le nom de leur tribu ne sera plus entendu à cinq cents milles de Damas. Je sèmerai de sel les fondations de leurs villages ; et à compter de cette époque, il n’y respirera aucune créature vivante.

— Je souhaite que la peine que vous vous proposez de prendre soit pour venger tout autre que moi, noble émir, mais mon vœu est inscrit dans le ciel : arrive que pourra ! et je vous serai obligé de m’indiquer la route que je dois prendre pour arriver au lieu où je dois passer la nuit.

— Ce sera, s’il te plaît, à l’ombre de la tente de mon père.

— Cette nuit est destinée à être passée par moi en prières et en pénitence avec un saint homme, Théodoric d’Engaddi, qui demeure au milieu de ces déserts, et qui consacre sa vie au service de Dieu.

— Au moins je t’y conduirai pour plus de sûreté.

— Ce me serait une escorte fort agréable, mais elle pourrait compromettre la tranquillité future du bon père, car la main cruelle de votre peuple s’est rougie du sang du serviteur de Dieu, et c’est pourquoi nous venons ici avec l’armure, la lance et l’épée, pour ouvrir le chemin du Saint-Sépulcre et protéger ces bienheureux anachorètes et ces saints élus qui habitent encore cette terre de promesse et de miracles.

— Nazaréen, en ceci, les Grecs et les Syriens nous ont fort ca-