Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/254

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fenêtres ; deux passants aussi qui se tinrent à l’abri de la lumière des torches, de peur d’être maltraités comme Olivier, furent témoins des outrages qu’il essuya dans la grande rue de cette ville. Quoique ces mauvais sujets fussent déguisés et portassent des masques, cependant leurs déguisements sont bien connus : ce sont d’élégants habits de mascarade, confectionnés, il y a quelques mois, par l’ordre de sir John Ramorny, écuyer de Son Altesse royale le duc de Rothsay, prince royal d’Écosse. »

Un murmure sourd parcourut l’assemblée.

« Oui, il en est ainsi, braves bourgeois, continua sir Patrick ; nos recherches ont abouti à cette découverte triste et terrible ; mais de même que personne ne regrette plus que moi le résultat auquel cette découverte semble devoir nous conduire, personne n’en appréhende moins les conséquences. Plusieurs artisans qui ont travaillé aux habits préparés pour sir John Ramorny les ont décrits comme exactement semblables aux costumes des personnes qui maltraitèrent Olivier Proudfute. Un ouvrier, Wingfield, le plumassier, qui a vu ces libertins quand ils avaient notre concitoyen en leur pouvoir, remarqua qu’ils portaient les ceintures et les couronnes de plumes peintes qu’il avait faites lui-même par ordre de l’écuyer du prince.

« Lorsque le malheureux s’échappa des mains de ses persécuteurs, nous perdons la trace d’Olivier ; mais nous pouvons prouver que ces hommes masqués se rendirent à la maison de sir Ramorny, où ils furent admis après quelque délai. On dit, Henri Smith, que vous avez vu notre malheureux concitoyen après qu’il eut échappé aux masques… Qu’y a-t-il de vrai dans ce bruit ? — Il vint chez moi, dans le Wynd, environ une heure avant minuit. Je le reçus un peu à contre-cœur, parce qu’il avait fait le carnaval tandis que j’étais resté à la maison, et que, comme dit le proverbe, la conversation ne va guère entre un homme qui a bu et un homme à jeun. — Et dans quel état semblait-il être quand vous le reçûtes chez vous ? — Il paraissait hors d’haleine ; il me parla plusieurs fois des dangers que lui avait fait courir une troupe d’hommes masqués. Je fis peu d’attention à ce qu’il disait ; car il fut toujours timide et même poltron, quoique excellent homme, et je supposais que ses dangers n’étaient qu’imaginaires. Mais je me reprocherai toujours, comme une grande faute, de ne l’avoir point accompagné comme il me le demandait, et si je vis, je fonderai des messes pour le repos de son âme, en expiation de mon