Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/256

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chers confrères et sages magistrats, il y a deux manières d’expliquer les faits, qui mènent toutes deux à la même conclusion. Les hommes masqués qui arrêtèrent notre concitoyen, et qui lui firent éprouver des mauvais traitements dont son cadavre conserve encore quelques traces, peuvent avoir rencontré le prisonnier qui leur avait échappé, au moment où il s’en retournait chez lui, et avoir mis le comble à leurs violences en lui donnant la mort. Lui-même exprima à Henri Gow la crainte que cela ne lui arrivât. Si les choses se sont ainsi passées, un ou plusieurs des gens de sir John Ramorny ont commis le meurtre. Mais à mon avis il est plus probable qu’un ou deux hommes de la bande restèrent dans la rue, ou qu’ils revinrent, peut-être, après avoir changé de déguisement, et là ils rencontrèrent Olivier Proudfute. Dans son costume ordinaire, Olivier n’aurait eu à craindre que de nouvelles plaisanteries ; mais, revêtu du costume de Henri Smith, il trompa malheureusement les yeux des malintentionnés : ceux-ci crurent voir l’armurier seul, et saisirent avec empressement l’occasion de se défaire d’un homme redoutable à tous ceux qui ne sont point de ses amis. Cette seconde manière de raisonner fait encore peser les soupçons du crime sur les gens appartenant à sir John Ramorny. Qu’en pensez-vous, messieurs ? n’avons-nous pas le droit de le leur imputer ? »

Ici les magistrats conférèrent un moment à voix basse, et répondirent en ces termes par l’organe du bailli Craigdaillie : « Noble chevalier et digne prévôt, nous approuvons sans réserve ce que votre sagesse a dit touchant cette horrible et sanglante affaire… Nous sommes convaincus par les judicieux raisonnements qui vous ont conduit à attribuer aux serviteurs ou compagnons de sir John l’action atroce qui a été accomplie sur notre concitoyen, soit pour son compte, soit par suite d’une méprise qui l’a fait confondre avec Henri du Wynd. Mais sir John entretient une nombreuse maison pour sa défense personnelle et comme écuyer du prince ; sans doute l’accusation sera repoussée par un démenti formel : nous demandons comment nous devons procéder dans ce cas. Il est vrai que si nous pouvions trouver une loi qui nous autorisât à mettre le feu à la maison, et à passer au fil de l’épée ceux qui l’habitent, le vieux proverbe, « Bien fait, qui tôt fait, » trouverait, dans ce cas, son entière application ; car jamais on ne vit réunis dans une maison plus de contempteurs de Dieu, de destructeurs d’hommes et de séducteurs de