Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/291

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son pied sur le corps de son ennemi vaincu, et en lui appuyant sur la gorge la pointe de sa hache qui se terminait par une espèce de poignard.

« Je le confesserai, » dit le scélérat en jetant un sauvage regard vers le ciel ; « laisse-moi lever. — Pas avant que tu te sois rendu, répliqua Henri Smith. — Je me rends, » murmura Bonthron, et Henri proclama à haute voix la défaite de son adversaire.

Les ducs de Rothsay et d’Albany, le grand connétable et le prieur des dominicains, entrèrent alors dans la lice, et s’adressant à Bonthron, lui demandèrent s’il se reconnaissait vaincu ? — Oui, répondit le mécréant. — Et coupable du meurtre d’Olivier Proudfute ? — Oui… mais je l’ai pris pour un autre. — Et qui comptais-tu frapper, dit le prieur ; confesse-toi, mon fils, et mérite ton pardon dans un autre monde, car tu n’as guère à en attendre dans celui-ci. — J’ai pris l’homme assassiné pour celui dont la main m’a terrassé, et dont le pied presse en ce moment ma poitrine. — Bénis soient les saints ! dit le prieur, maintenant tous ceux qui doutaient de la vertu de cette sainte épreuve peuvent ouvrir les yeux sur leur erreur. Voyez, il s’est pris au piège qu’il avait tendu à l’innocent. — Je ne l’avais jamais vu auparavant, dit Smith ; jamais je n’avais fait de mal à lui ni aux siens… Que Votre Révérence daigne lui demander comment il eut la pensée de m’assassiner par trahison ? — C’est une question convenable, répondit le prieur. Rends gloire à qui elle est due, mon fils, quoique par elle se manifeste ta honte. Pour quelle raison voulais-tu assassiner cet armurier qui dit ne t’avoir jamais fait de mal ? — Il en avait fait à celui que je servais, répondit Bonthron, et je méditai ce coup par son ordre. — Par l’ordre de qui ? » demanda le prieur.

Bonthron garda un moment le silence, et il ajouta en grommelant : « Il est trop puissant pour que je le nomme. — Écoute-moi, mon fils, dit le prêtre ; encore un instant, et les puissants et les faibles de cette terre seront pour toi comme de vains sons. On prépare en ce moment même la charrette qui doit te conduire au lieu de l’exécution ; je te conjure donc encore une fois, mon fils, d’avoir égard au salut de ton âme en rendant gloire à Dieu et en disant la vérité : était-ce ton maître, sir John Ramorny, qui t’avait excité à une si abominable action ? — Non, répondit l’infâme scélérat, c’était un personnage plus grand que lui, » et en même temps il désigna le prince du doigt.