Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/316

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son visage. Il sauta à bas du cheval, et Dorothée avait à peine eu le temps de répondre que le gantier était dans sa chambre à coucher, que l’étranger monta l’escalier et entra dans l’appartement de Simon. Celui-ci, surpris et effrayé, se disposait à voir dans l’homme qui le visitait de si bonne heure un appariteur ou un huissier venant pour l’arrêter lui et sa fille ; il fut grandement soulagé quand l’étranger, ôtant son bonnet et baissant son manteau, se fit connaître pour le chevalier prévôt de la belle ville, visite qui, dans tous les temps, était une faveur extraordinaire, mais qui, à une pareille heure, avait quelque chose de merveilleux ; et dans les circonstances où se trouvait Simon, c’était un événement alarmant.

« Sir Patrick Charteris ! dit le gantier. Cet honneur insigne, accordé à votre humble serviteur… — Chut ! interrompit le chevalier. Ce n’est pas le moment de faire des civilités. Je suis venu ici parce que, dans les circonstances importantes, on ne peut trouver de meilleur page que soi-même ; je ne puis rester que le temps nécessaire pour vous dire de fuir, bon Glover ; car des mandats d’arrêt seront délivrés aujourd’hui par le conseil contre toi et ta fille, comme accusés d’hérésie ; le moindre délai vous coûterait certainement la liberté et peut-être la vie. — J’en ai entendu dire quelque chose, répondit le gantier, et j’allais partir pour Kinfauns, pour me justifier auprès de vous de cette calomnieuse accusation, vous demander conseil et implorer votre protection. — Ton innocence, ami Simon, te servirait peu devant des juges prévenus ; mon avis est que tu dois prendre la fuite et attendre des temps plus heureux. Quant à ma protection, il faut attendre que la marée descende avant qu’elle puisse t’être de quelque secours. Mais si tu peux rester caché pendant quelques jours ou quelques semaines, je ne doute pas que le clergé, qui aujourd’hui veut soutenir le duc d’Albany dans une intrigue de cour, et qui, en déclarant que la décadence de la pureté de la foi est la seule cause des malheurs publics, exerce pour le moment une autorité irrésistible sur le faible roi, je ne doute pas que le clergé ne reçoive bientôt un échec. Apprends toutefois qu’en attendant, le roi a non-seulement consenti à cette enquête générale contre l’hérésie, mais qu’il a encore confirmé la bulle du pape, qui élève Henri de Wardlaw au rang d’archevêque de Saint-Andrew et de primat d’Écosse ; ainsi il abandonne à Rome ces libertés et franchises de l’Église écossaise que ses ancêtres, depuis le temps de Malcolm