Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/332

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époque belliqueuse : en effet, les montagnards se servaient beaucoup de cette arme, quoique leurs armes de jet fussent inférieures pour la perfection de la forme, et surtout pour la portée, à celles des archers de la joyeuse Angleterre. Les ifs noirs et fracassés qui restaient encore ressemblaient à de vieux soldats d’une armée en déroute, occupant en désordre quelque poste avantageux, bien décidés à le défendre jusqu’à l’extrémité. Derrière cette éminence, mais sans y être assise, s’élevait une colline plus haute, couverte en partie de buissons, en partie de pâturages, où les bestiaux trouvaient une maigre nourriture auprès des sources et des endroits marécageux qui faisaient croître quelque verdure.

Vis-à-vis, la rive septentrionale du lac offrait un aspect plus montueux que celle où se trouvait le gantier. Des bois et des bosquets s’élevaient sur le flanc des montagnes, et disparaissaient dans les sinuosités formées par les ravins qui les séparaient entre elles ; mais bien au-dessus de ces échantillons d’un sol peu fécond, s’élevaient des montagnes noires et nues, dans toute la désolation de la saison.

Quelques-unes étaient terminées en pics, d’autres en plateformes ; plusieurs n’offraient que des rocs et des précipices ; d’autres avaient un contour plus agréable ; et tout ce clan de Titans semblait être commandé par des chefs de la même race ; c’était la montagne de Ben-Lawers à la contenance sévère, et la montagne encore plus haute de Ben-Mohr, s’élevant bien au-dessus de toutes les autres, et dont le pic conserve un brillant casque de neige bien avant dans l’été et souvent même toute l’année. Cependant les confins de cette sauvage région couverte de forêts, dans les endroits où les montagnes s’abaissaient vers le lac, offraient, même à cette époque reculée, beaucoup de traces d’habitations humaines. On voyait des hameaux, surtout sur les bords septentrionaux du lac, à moitié cachés dans les petites vallées qui envoyaient dans le lac le tribut de leurs ruisseaux. Ces hameaux, comme la plupart des choses d’ici-bas, avaient de loin une belle apparence ; mais, lorsqu’on approchait, ils étaient repoussants et inspiraient le dégoût par leur malpropreté, et parce qu’ils manquaient des commodités dont sont pourvus même les wigwams indiens. Ils étaient habités par une race qui ne cultivait point la terre, et qui ne recherchait point les jouissances que procure l’industrie. Les femmes, traitées sous les autres rapports avec affection, et même avec des égards particuliers, étaient