Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/35

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miroir, et tira vitement de sa bourse quelque charpie sèche pour l’appliquer sur la légère blessure qu’il avait reçue. Lorsqu’il détacha la veste de cuir qui lui cachait le cou et les épaules, les formes mâles et musculaires qu’il mit à nu n’étaient pas plus remarquables que la blancheur de sa peau qui là n’avait point été, comme aux mains et au visage, exposée aux effets d’une atmosphère embrasée et d’un travail pénible. Il eut bientôt arrêté le sang avec de la charpie ; et après avoir effacé toute trace de combat avec un peu d’eau, il reboutonna sa veste et revint vers la table où se trouvait Catherine, encore pâle et tremblante, mais revenue de son évanouissement.

« Me pardonnerez-vous de vous avoir offensée dès la première heure même de mon retour. Ce jeune homme fut insensé en me provoquant, et je fus, moi, encore plus insensé en me croyant provoqué par un enfant tel que lui. Votre père ne m’en blâme pas, Catherine ; ne pouvez-vous me pardonner ? — Il m’est impossible de pardonner, répliqua Catherine, ce dont je n’ai pas le droit de me fâcher. S’il plaît à mon père de faire de la maison un théâtre de querelles nocturnes, il me faut en être témoin… Je ne puis l’empêcher. J’ai eu tort peut-être de m’évanouir, et de terminer ainsi un combat si bien commencé. Excusez-moi, je ne puis supporter la vue du sang. — Est-ce donc ainsi, dit Glover, que tu reçois mon ami après sa longue absence ? mon ami, ai-je dit ? c’est mon fils. Il manque d’être assassiné par un drôle dont je purgerai demain mon logis, et tu le traites comme s’il avait mal fait en écartant de lui la lame qui allait le percer. — Il ne m’appartient pas, mon père, répondit la Jolie Fille de Perth, de décider qui a eu tort ou raison dans cette dispute ; et je n’ai pas vu assez distinctement ce qui s’est passé pour dire quel fut l’assaillant ou l’assailli. Mais certainement notre ami maître Henri ne niera point qu’il vit dans une véritable atmosphère de querelles, de combats et de sang. Il n’entend point parler d’un tireur, qu’il n’envie sa réputation et n’ait besoin de mettre sa valeur à l’épreuve. Il ne voit pas de querelles dont il ne lui faille se mêler. A-t-il des amis, il se bat avec eux pour l’amitié et l’honneur ; des ennemis, il se bat avec eux par haine et vengeance. N’êtes-vous ni son ami, ni son ennemi, il se battra avec vous, parce qu’il vous rencontrera de tel ou tel côté d’une rivière. Ses jours sont jours de batailles, et sans doute il ferraille encore en rêves. — Jeune fille, répliqua le père, votre langue remue trop librement :