Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/364

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combat au ciel et à l’enfer, et je le soutiendrai contre quiconque dira que cela est vrai. Tu as été regardé par un mauvais œil, mon enfant ; et la faiblesse que tu appelles lâcheté, est l’œuvre de la magie. Je me rappelle la chauve-souris qui éteignit la torche à l’instant où tu naquis, à cet instant de joie et de malheurs. Courage, mon enfant chéri ! tu viendras avec moi à Jona, et le saint Colombus et tous les chœurs des saints et des anges qui ont toujours protégé ta famille, retireront de ton sein le cœur de la biche blanche, et te rendront celui que l’on t’a enlevé. »

Éachin écoutait de l’air d’un homme qui aurait désiré croire à ces paroles de consolation.

« Mais, Torquil, dit-il, en supposant que le pèlerinage puisse nous servir, le jour fatal approche ; et si j’entre dans la lice, je crains de me couvrir de honte. — Cela ne sera pas. L’enfer n’aura pas toute puissance ; nous tremperons ton épée dans l’eau bénite ; nous mettrons sur ton cimier de la verveine et de l’herbe Saint-Jean ; nous t’entourerons, moi et tes huit frères ; tu seras en sûreté comme dans une citadelle. »

Le jeune homme murmura encore quelques mots d’un ton si abattu que Simon ne put les entendre ; tandis que la réponse de Torquil, prononcée d’une voix forte, arriva clairement à son oreille.

« Oui, il peut y avoir un moyen de te tirer de ce combat. Tu es le plus jeune de ceux qui doivent se battre. Maintenant, écoute-moi, et tu sauras ce que c’est d’avoir un père nourricier qui t’aime, et combien son amour l’emporte sur tout autre amour. Le plus jeune des champions du clan de Chattan est Ferquhard-Day ; son père a tué le mien, et le sang versé fume encore entre nous. Je comptais sur le dimanche des Rameaux pour le refroidir… Mais, écoute ! Tu aurais cru que le sang de ce Ferquhard-Day ne se serait pas mêlé avec le mien, quand même ils auraient été mis ensemble dans le même vase. Eh bien ! il a jeté un œil amoureux sur Éva, ma fille unique, la plus belle fille de notre clan. Pense quel sentiment j’éprouvai en apprenant cette nouvelle ; c’était comme si un loup des forêts de Ferragon m’eut dit : « Donne-moi ta fille en mariage, Torquil. » Ma fille ne pense point ainsi ; elle aime Ferquhard, et perd ses couleurs et sa vie à l’idée du combat qui approche. Qu’elle lui donne quelque marque de faveur, et je suis sûr qu’il abandonne ses parents, renonce au combat, et s’enfuit avec elle dans le désert. — Le plus jeune des