Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/373

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sonnier, parlez sans détour ; si je ne le suis pas, je prendrai la liberté de partir. — Je désirerais, milord, que Votre Altesse demandât à Sa Majesté la permission de faire ce voyage ; elle en sera fort mécontente. — Voulez-vous dire mécontente de vous, milord, ou de moi ? — J’ai déjà dit à Votre Altesse qu’elle est ici sous ma garde ; mais si vous êtes décidé à partir, je n’ai pas l’ordre, à Dieu ne plaise, d’user de force pour vous retenir. Je ne puis que supplier Votre Altesse, dans son intérêt même… — Je suis le meilleur juge de mes propres intérêts. Adieu, milord. »

Le prince entêté entra dans le bateau avec Dwining et Ramorny, et sans attendre personne, Éviot poussa au large le bateau qui descendit rapidement le Tay, avec l’aide d’une voile, des rames et du reflux.

Pendant quelque temps le duc de Rothsay parut silencieux et pensif, et ses compagnons n’interrompirent point ses réflexions. Enfin il leva la tête et dit : « Mon père ne hait point une plaisanterie, et il ne prendra pas celle-ci plus au sérieux qu’elle ne mérite ; il n’y verra qu’une folie de jeunesse qu’il traitera comme il a traité les autres. Voici, mes maîtres, le vieux château de Kinfauns qui s’élève sur le Tay avec son aspect refrogné. Maintenant dis-moi, Ramorny, comment as-tu fait pour tirer la Jolie Fille de Perth des mains de cet entêté de prévôt ; car, à ce que m’a dit Errol, le bruit courait qu’elle était sous sa protection. — Elle y était en effet, milord ; mais sir Patrick avait l’intention de la placer sous la protection de la duchesse, je veux dire de lady Marjory Douglas. Ce prévôt à tête dure, qui n’est après tout qu’une pièce de courage brut, a, parmi les gens de sa suite, comme beaucoup de gens de son espèce, un homme de quelque adresse dont il se sert dans toutes les affaires, et dont il considère généralement les suggestions comme ses propres idées. Quand je veux connaître les projets de quelque baron imbécile, je m’adresse à un pareil confident. Celui-ci s’appelle Kitt Henshaw, ancien marinier sur le Tay, et qui ayant autrefois été sur mer jusqu’à Campvère, a pour sir Patrick le respect dû à un homme qui a vu les contrées lointaines. J’ai mis cet agent dans mes intérêts, et, par son moyen, j’ai fait présenter divers motifs pour retarder le voyage de Catherine pour Falkland. — Mais dans quel dessein ? — Je ne sais s’il est sage à moi de vous le dire, dans la crainte que vous ne désapprouviez mes vues. Je voulais que les officiers de la commission contre l’hérésie trouvassent la Jolie