Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/39

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soient, et méritez le pardon du ciel en disant adieu à tout ce qui peut vous entraîner au péché dont vous vous rendez si souvent coupable. — Et que ferai-je pour vivre, murmura l’armurier, quand j’aurai dit adieu à l’art de fabriquer des armes, pour lequel Henri de Perth est connu du Tay à la Tamise ? — Votre art même a d’innocentes et louables ressources. Si vous renoncez à forger des sabres et des boucliers, il vous reste encore à fabriquer la bêche inoffensive et le soc honorable et utile de la charrue, et tous ces instruments qui satisfont aux besoins de la vie ou à ses plaisirs. Vous pouvez construire des serrures et des verrous pour défendre la propriété du faible contre le brigandage et l’oppression du fort. Les hommes auront encore besoin de vous, et vous paieront votre paisible industrie. »

Mais ici Catherine fut interrompue : son père l’avait entendue déclamer contre la guerre et les tournois. En réfléchissant que, quoique ces doctrines fussent nouvelles pour lui, elles pouvaient néanmoins ne pas être erronées, il souhaitait, à coup sûr, que le gendre qu’il se proposait de prendre n’allât point s’exposer volontairement aux risques que le caractère audacieux et la force remarquable de Henri Smith lui avaient jusque-là fait trop aisément encourir. Il aurait désiré que les arguments de Catherine produisissent quelque effet sur l’esprit de son amant, qu’il savait être aussi maniable quand des affections l’influençaient, que fier et intraitable lorsqu’il était assailli par d’hostiles remontrances ou des menaces. Mais les arguments de la Jolie Fille contrarièrent les vues du gantier, quand il l’entendit insister sur la nécessité d’abandonner un métier qui arrondissait les fortunes mieux qu’aucun autre alors exercé en Écosse, et qui profitait plus à Henri de Perth en particulier, qu’à tout autre armurier du royaume. Glover avait une vague idée qu’il ne serait pas mal d’arracher Henri le forgeron à son trop fréquent usage des armes, s’il était possible, quoiqu’il sentît quelque orgueil de s’allier à un homme qui maniait avec une habileté supérieure les armes dans ce siècle belliqueux où l’on était fier de les porter avec courage. Enfin, quand il entendit sa fille recommander à son amant, comme la voie la plus directe pour reprendre des habitudes paisibles, de renoncer au métier lucratif où il n’avait point de rival, et qui, vu la continuité des querelles privées et des guerres publiques de l’époque, devait, à coup sûr, procurer une belle fortune, il ne put contenir davantage sa colère. À peine Catherine