Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/420

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moins par une ombre de dévotion, au combat sanguinaire de la journée. On avait eu grand soin que, durant cette marche, ils n’entendissent même pas le son des cornemuses les uns des autres ; car il était certain que, comme des coqs de combat qui échangent des chants de défi, ils se fussent cherchés et attaqués les uns les autres avant d’être entrés dans la lice.

Les citoyens de Perth encombraient les rues pour voir passer cette étrange procession, et se pressaient vers les églises, où les deux clans s’acquittaient de leur dévotion, pour examiner leur extérieur, et juger d’avance, à leur apparence seule, lequel avait le plus de chance pour remporter la victoire. La conduite des montagnards dans l’église, quoiqu’ils ne fréquentassent point d’habitude les lieux saints, fut parfaitement décente ; et malgré leur nature sauvage et grossière, peu d’entre eux semblaient montrer ou de la curiosité ou de l’étonnement. Ils paraissaient regarder comme au-dessous de leur dignité de témoigner empressement ou surprise en voyant bien des choses qui tombaient alors probablement sous leurs yeux pour la première fois.

Quant à l’issue du combat, même parmi les juges les plus compétents, peu osaient hasarder une prédiction. Quoique la grande taille de Torquil et de ses huit vigoureux fils portât quelques gens, qui se déclaraient connaisseurs en muscles et en nerfs d’hommes, à pencher pour donner la victoire au parti du clan de Quhele, l’opinion des femmes était bien décidée en faveur des belles formes, de la noble contenance et de la gracieuse tournure d’Éachin Mac-Jan. Il y en avait plus d’une qui s’imaginait se rappeler les traits du chieftain ; mais son splendide équipement de guerre rendait l’humble apprenti de Glover tout à fait méconnaissable, sauf pour une seule personne.

Cette personne, comme on peut bien le supposer, était l’armurier du Wynd, qui avait été le plus empressé de la foule qui s’ameutait pour voir les braves champions du clan de Quhele. Ce fut avec des sentiments confus de plaisir, de jalousie, et peut-être même d’admiration, qu’il aperçut l’apprenti du gantier, qui, dégagé de son joug ignoble, et brillant comme un chieftain, semblait par son œil vif et sa démarche pleine de dignité, par la noble forme de son front et la grâce de son cou, par ses armes splendides et ses membres bien proportionnés, fort digne de tenir le premier rang parmi des hommes choisis pour vaincre ou mourir au nom de l’honneur de leur race. Le forgeron put à peine croire