Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/99

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courage ! le drôle n’a eu l’avantage sur vous qu’à cause de votre cheval indiscipliné. — C’est vrai, c’est vrai, » dit Olivier s’accrochant avec empressement à cette excuse.

« Et voilà le bandit arrêté là-bas, qui s’applaudit du mal qu’il a fait, et triomphe de votre défaite, comme ce roi d’un roman, qui jouait du violon pendant qu’une ville brûlait. Venez un peu avec moi, et vous verrez comment nous l’arrangerons… Ne craignez pas que je déserte cette fois. »

En parlant ainsi, il prit Jézabel par la bride, et partit au galop en l’entraînant, sans donner à Olivier le temps de répondre non ; il se dirigeait ainsi vers Dick du Diable qui s’était arrêté sur le haut d’une petite éminence à quelque distance. Le noble Johnstone cependant, soit qu’il crût le combat inégal, soit qu’il se fût assez battu pour un jour, fit claquer ses doigts, et levant la tête avec un air de défi, lança son cheval dans un marais à travers duquel il sembla nager comme un canard sauvage ; cependant il brandissait son leurre autour de sa tête, et sifflait tranquillement son faucon dans un lieu où tout autre cheval et tout autre cavalier se fussent dès le premier pas enfoncés jusqu’à la sangle.

« C’est là un véritable coureur de marais, dit le forgeron ; ce drôle peut combattre ou s’enfuir selon son envie, et il n’est pas plus utile de le poursuivre que de courir après une oie sauvage. Il vous a pris votre bourse, sans doute ; car ces gens-là s’en vont rarement avant d’avoir rempli leurs mains. — Ou… ou… oui, » répondit Proudfute d’un ton mélancolique ; « il m’a pris ma bourse ; mais il ne faut pas se plaindre, puisqu’il m’a laissé mon carnier. — Il est vrai, le carnier eût été pour lui un emblème de victoire ; un trophée, comme disent les ménestrels. — Il renferme quelque chose de mieux, l’ami, » dit Olivier d’un ton significatif.

« Vraiment ? Dieu soit loué, voisin ! j’aime à vous entendre parler encore sur votre ton doctoral. Réjouissez-vous ! le coquin a pris la fuite, et vous avez reconquis la gloire que vous aviez perdue lorsqu’il avait sur vous tout l’avantage. — Ah ! Henri Gow ! Henri Gow ! » dit le bonnetier ; et il s’arrêta court en poussant un gros soupir qui ressemblait à un gémissement.

« Qu’est-ce donc ? demanda son ami ; qu’est-ce qui vous tourmente à présent ? — Je soupçonne un peu, mon cher Henri Smith, que le coquin s’est enfui, crainte de vous, et non de moi. — Ne dites pas cela, répliqua l’armurier ; il a vu deux hommes et s’est