Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/116

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personnels, tandis que réellement leur laideur était notable et même étrange à faire mourir de rire. Le chevalier anglais, qui connaissait aussi les saintes femmes, ne put s’empêcher de sourire de son côté.

« J’admets, dit-il, que, si les pieuses sœurs ont pu charmer le jeune étranger, ce n’a pu être que par leurs souhaits bienveillants et leurs attentions à soulager ses souffrances. — Sœur Béatrix, » continua le père, reprenant sa gravité, » a effectivement reçu du ciel un véritable don pour faire les confitures et les caillés de lait au vin ; mais, après une enquête minutieuse, je n’ai pas trouvé que le jeune homme ait goûté de ces bonnes choses. Sœur Ursule, non plus, n’a pas été tant maltraitée par la nature que par les suites d’un accident ; mais Votre Honneur sait que quand une femme est laide, les hommes ne s’inquiètent guère de la cause de sa laideur. Je vais, avec votre permission, voir en quel état se trouve actuellement le jeune homme, et l’avertir qu’il ait à comparaître devant vous. — Je vous prie de le faire, et tout de suite, père, car il n’y a point de temps à perdre ; je vous conseille aussi sérieusement d’épier de la manière la plus stricte la conduite de cet Augustin : vous ne pouvez y mettre trop d’attention. Je vais attendre votre retour, et j’emmènerai le jeune homme au château ou le laisserai ici, suivant que les circonstances paraîtront l’exiger. »

L’abbé s’inclina, promit de faire son possible, et sortit de la chambre pour se rendre à la cellule du jeune Augustin, jaloux de satisfaire les désirs de Valence, qu’il regardait, par suite des circonstances, comme son patron militaire.

Son absence dura long-temps, et ce délai commençait même à inspirer des soupçons à sir Aymer, lorsque l’abbé revint, l’agitation et l’inquiétude écrites sur le visage.

« Je vous demande pardon de vous avoir fait attendre, » dit Jérôme avec un grand trouble ; « mais j’ai été moi-même retenu et vexé par des formalités inutiles et de sots scrupules de la part de ce méchant garçon. En premier lieu, entendant mes pas se diriger vers sa chambre, mon jeune homme, au lieu d’ouvrir la porte, ce qui n’aurait été qu’un égard dû à mes fonctions, tira au contraire un fort verrou intérieur ; et ce verrou, Dieu me pardonne ! a été mis dans sa cellule par ordre de sœur Ursule, afin que son sommeil pût être convenablement respecté. Je le prévins du mieux que je pus qu’il devait se rendre sans délai devant vous, et se préparer à vous accompagner au château de Douglas ; mais il ne voulut pas