Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/130

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comme il n’est que trop probable pour moi, de celle de l’amant pour qui vous avez déjà tant fait ? »

La jeune Anglaise regarda une seconde fois son amie, et ne put s’empêcher de frissonner un peu à cette idée : Quoi ! sa jolie figure pouvait un jour être semblable à la physionomie déplorable de Marguerite de Hautlieu !

« Croyez-moi, » répondit-elle, en levant avec dignité ses regards vers le ciel, « même dans le cas que vous supposez, je ne m’affligerais pas tant pour moi-même que pour l’amant à idées étroites aussi follement attaché à des charmes que le temps doit tôt ou tard détruire. De quelle manière cependant, et jusqu’à quel point des personnes dont le caractère ne nous est pas pleinement connu peuvent-elles être affectées par de tels changements ? c’est ce que la Providence pourrait seule nous révéler. Je puis seulement vous assurer que j’espère avec vous, et qu’aucune difficulté ne se trouvera désormais sur votre passage, s’il est en mon pouvoir de l’en écarter… Écoutez ! — C’est le signal de notre liberté, » répliqua Ursule, prêtant l’oreille à un son qui ressemblait au cri d’un oiseau de nuit. « Il faut nous préparer à quitter le couvent sous peu de minutes. Avez-vous quelque chose à emporter ? — Rien, répondit lady Augusta de Berkely, sinon quelques bijoux que j’avais, à tout hasard, pris sur moi pour venir ici. Ce billet que je vais laisser donne à mon fidèle ménestrel le moyen de se tirer d’affaire en avouant à sir John de Walton quelle est réellement la personne qu’il avait en son pouvoir. — Il est étrange, dit la novice de Sainte-Brigitte, à travers quels labyrinthes extraordinaires l’amour, ce sentiment bizarre, conduit les personnes qui se vouent à lui. Prenez garde en descendant ; cette trappe, soigneusement cachée, mène à une porte secrète où nous attendent déjà des chevaux qui nous faciliteront les moyens de dire promptement adieu à Sainte-Brigitte ; que Dieu la protège elle et son couvent ! Nous ne pourrons voir clair que quand nous sortirons de ces corridors. »

Cependant sœur Ursule, s’il nous est permis de lui donner pour la dernière fois son nom monastique, changea sa large et longue robe contre un manteau et un capuchon plus étroit de cavalier. Elle conduisit sa compagne par divers passages habilement compliqués, jusqu’à ce que lady de Beikely, le cœur battant de crainte, revît la lumière pâle et douteuse de la lune, qui brillait sur les murailles grises de l’ancien édifice. L’imitation du cri d’un hibou les dirigea vers un grand orme voisin, et approchant de l’arbre, elles distin-