Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/184

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d’un saint descendu du ciel ; et les Anglais attendaient, frappés d’un muet étonnement, comme s’ils eussent craint qu’à quelque signal inopiné une attaque ne fût tentée contre eux, soit par les puissances de la terre ou du ciel, soit par les unes et par les autres réunies. En effet, tel était le dévoûment des membres du haut clergé d’Écosse aux intérêts du parti de Bruce, que les Anglais ne leur permettaient qu’à peine de prendre part même aux cérémonies de l’Église qui étaient de leur domaine particulier : aussi la présence de l’archevêque de Glasgow, officiant un jour de si grande fête dans l’église de Douglas, était une circonstance assez rare, et qui ne pouvait manquer d’exciter la surprise et les soupçons. Cependant un concile de l’Église avait récemment enjoint aux premiers prélats écossais de remplir leur devoir le jour de la fête des Rameaux, et ni les Anglais ni les Écossais ne voyaient cette cérémonie avec indifférence. Le silence inaccoutumé qui régnait dans l’église remplie, à ce qu’il semblait, de personnes dont les vues, les espérances, les désirs et les vœux étaient si différents, ressemblait à un de ces calmes solennels qui souvent précèdent le choc des éléments, et qui sont bien connus pour être les présages de quelque terrible convulsion de la nature. Tous les animaux, suivant leurs instincts divers, expriment leur prévision de la tempête qui approche : les buffles, les daims et les autres habitants des forêts se retirent dans leurs retraites les plus profondes ; les brebis s’empressent de regagner leur parc, et la lourde stupeur de toute la nature, soit animée soit inanimée, présage qu’elle se réveillera bientôt par un bouleversement et un choc général, quand l’éclair livide sillonnera la nue de manière à précéder dignement les sourds roulements du tonnerre.

C’était ainsi que, plongés dans un profond silence, ceux qui s’étaient rendus à l’église en armes à l’appel de Douglas épiaient et attendaient à chaque instant un signal d’attaque, tandis que les soldats de la garnison anglaise, convaincus des mauvaises dispositions des Écossais à leur égard, croyaient à chaque instant qu’ils allaient entendre le cri bien connu de « Arcs et Bills ! » donner le signal d’un combat général ; et les deux partis, se regardant l’un l’autre avec fierté, semblaient préparés à la lutte fatale.

Malgré la tempête qui paraissait à chaque moment prête à éclater, l’archevêque de Glasgow continuait de s’acquitter avec la plus grande solennité des cérémonies particulières à la fête ; il s’arrêtait de temps à autre pour regarder la multitude, comme calculant si les turbulentes passions de ceux qui l’entouraient pourraient être