Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/250

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que le nouveau venu n’était pas ne pour la profession qu’il exerçait ; mais la gageure portait qu’il devait le lui demander à lui-même avant dix minutes, et c’était ce qui embarrassait le baronnet, qui jugeait prudent d’apporter quelque précaution dans une telle ambassade. Saluant donc profondément et prenant un détour, il s’annonça à l’étranger comme sir Bingo Binks.

« Eu… monsieur… l’honneur… écrire, » furent les seuls sons que son gosier, ou plutôt sa cravate, sembla laisser échapper. Ensuite avec un tact instinctif que l’esprit de sa propre conservation paraissait inspirer à un cerveau qui n’était ni des plus subtils ni des plus délicats, il fit précéder sa question de quelques remarques générales sur la pêche et la chasse. Les connaissances que notre héros montra sur ces matières inspirèrent le plus grand respect à sir Bingo, et lui persuadèrent qu’il ne pouvait être ou n’avait pas toujours été l’artiste ambulant pour lequel il se donnait… ce qui, ajouté à la rapidité avec laquelle s’écoulaient les dix minutes, le porta à lui adresser ces paroles : « Je dis, monsieur Tyrrel… mais, vous avez été un des nôtres… je dis. — Si vous voulez dire un chasseur, sir Bingo… j’ai été, et je suis encore au nombre des plus déterminés, répliqua Tyrrel. — Vous n’avez donc pas fait toujours cette sorte de chose ? — Quelle sorte de chose entendez-vous, sir Bingo ? dit Tyrrel ; je n’ai pas le plaisir de vous comprendre. — Mais j’entends ces esquisses ; je vous en ferai une jolie commande si vous voulez me répondre ; je vous en assure sur mon honneur. — Est-ce qu’il vous importe particulièrement, monsieur, de connaître quelque chose de mes affaires ? — Non, certainement… non pas directement, » répondit sir Bingo avec quelque hésitation, car le ton sec des réponses de Tyrrel était loin de lui plaire autant qu’une rasade de sherry ; « seulement j’ai dit que vous étiez un gaillard qui connaît diablement de choses, et j’ai parié que vous n’aviez pas toujours exercé la profession d’artiste… voilà tout. — Un pari avec M. Mowbray, je suppose ? répliqua Tyrrel. — Oui, avec Jacques… vous avez deviné… J’espère que je l’ai refait ? »

Tyrrel fronça le sourcil, regarda d’abord M. Mowbray, ensuite le baronnet, puis adressa ces mots au dernier : « Sir Bingo Binks, vous mettez beaucoup d’élégance dans votre manière d’interroger, et vous avez de la pénétration dans le jugement… Vous avez parfaitement raison… je n’ai pas été élevé pour la profession d’artiste, et je ne l’exerçai pas anciennement, quelque chose que je fasse maintenant. J’ai répondu à votre question. — Et Jacques est en-