Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/264

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médecin habile, mistress Blower, sait abattre cette santé robuste, qui est un état très alarmant de la constitution quand on le considère secundum artem. — Oui, oui, docteur, je sens parfaitement, sans aucun doute, le grand avantage d’avoir une personne habile auprès de soi. »

Ici la voix du docteur, dans son vif désir de convaincre mistress Blower du danger de se supposer capable de vivre et de respirer sans la permission d’un médecin, s’abaissa au point de devenir inintelligible.

Sans adopter la sévérité des conclusions du docteur au sujet de Clara Mowbray, elle était certainement d’une humeur inégale ; et ses accès d’humeur bizarre étaient séparés par de longs intervalles de tristesse. Sa légèreté paraissait aussi plus grande aux yeux du monde qu’elle ne l’était réellement ; car personne n’était là pour lui apprendre que certaines formes et une certaine retenue sont nécessaires dans le monde, non seulement par rapport aux autres, mais plus encore par rapport à nous-mêmes.

Sa manière de s’habiller, sa tournure et ses idées lui appartenaient donc en propre, et, quoiqu’elles lui allassent à merveille, cependant, de même que les guirlandes fantastiques et les mélodies bizarres d’Ophélia, elles disposaient l’observateur à la compassion et à la tristesse.

« Et pourquoi n’êtes-vous pas venue au dîner ? » lui demanda tout-à-coup Sa Seigneurie.

« Je serais à peine venue au thé, répliqua miss Mowbray, si je n’avais consulté que ma volonté ; mais mon frère dit que Votre Seigneurie se propose de venir à Shaws-Castle, et il a jugé convenable et nécessaire, pour vous confirmer dans un dessein si flatteur, que je vinsse vous dire : Je vous en prie ; faites-le, lady Pénélope ; et ainsi me voilà pour vous dire : Je vous en prie, venez. — Est-ce qu’une invitation si flatteuse se borne à moi seule, ma chère Clara ?… Lady Binks, sera jalouse. — Amenez lady Binks si elle condescend à nous faire cet honneur… (une révérence assez raide fut échangée entre les deux dames)… amenez MM. Springblossom… Winterblossom… et tous les lions et lionnes… nous avons place pour toute la collection. Mon frère, je suppose, amènera son régiment d’ours, ce qui, avec l’assortiment ordinaire de singes que l’on voit dans toutes les caravanes, complétera la ménagerie. Comment vous serez traités à Shaws-Castle, c’est, Dieu merci, ce qui ne me regarde pas, mais John. — Nous n’avons pas besoin d’être traités avec apparat, ma bonne