Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/324

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bray… on dit qu’elle va se marier, et aller demeurer en Angleterre avec un de ces coucous qui sont là-bas au bord de la mare.

— Mariée ! s’écria le ministre, est-ce possible ? — Qu’y a-t-il d’impossible, monsieur Cargill, quand vous voyez des fous se marier chaque jour, et par votre entremise encore ?… Vous pensez peut-être que la pauvre fille n’ayant pas la tête tout-à fait à elle… mais si les sages seuls se mariaient, ce monde serait bientôt dépeuplé. Je crois que ce sont les sages comme vous, monsieur Cargill, et comme moi, qui ne se marient point… Dieu nous conserve !… Vous trouvez-vous mal ?… voulez-vous prendre quelque chose ? — Respirez mon eau de rose, dit M. Touchwood ; ce parfum ressusciterait un mort… Comment, au nom du diable ! qu’est-ce que cela veut dire ?… vous étiez parfaitement bien il n’y a qu’un instant. — Une douleur subite, » répondit M. Cargill en reprenant ses sens ; « mais je me sens mieux à présent. — Oh ! monsieur Cargill, répondit mistress Dods, cela vient de vos longs jeûnes. — Oui, bonne dame, interompit M. Touchwood, de ce qu’il se nourrit de lait aigre et de mauvais pois. Le plus petit morceau de nourriture chrétienne est alors rejeté par l’estomac, comme un pauvre gentilhomme refuse sa porte à un riche voisin de peur de lui laisser voir la misère du pays. — Et parle-t-on réellement à Saint-Ronan du mariage de miss Mowbray ? demanda le curé. — Oui, en vérité, répondit mistress Dods ; c’est une nouvelle de Nelly la trotteuse, et quoiqu’elle aime à boire un coup, je ne pense pas qu’elle soit capable d’en inventer de fausses, ou de m’en venir rapporter, à moi qui suis une bonne pratique. — Ceci mérite réflexion, » reprit M. Cargill, comme se parlant à lui-même.

« Oui, assurément, dit mistress Dods ; ce serait un péché et un scandale s’ils employaient cette cymbale retentissante qu’on nomme Chatterly, quand il y a dans le pays une véritable trompette presbytérienne, comme vous, M. Cargill. — C’est vrai, c’est vrai, bonne mistress Dods, dit le nabab. Les gants et les rubans sont des choses de quelque importance, et M. Cargill fera bien de venir avec moi à ces réjouissances maudites pour veiller à ses intérêts. — Il faut que je parle à la jeune dame, » répliqua le ministre avec un air distrait. — Bien dit, mon ami, grand connaisseur en lettres gothiques, reprit le nabab. Vous viendrez avec moi, et nous leur apprendrons à se soumettre à notre sainte mère l’Église, je vous le garantis… Ah ! l’idée de se voir ainsi couper l’herbe sous le pied tirerait un santon de ses contemplations !… Quel costume pren-