Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/359

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un sujet de conversation pour toute la Grande-Bretagne, pendant qu’elle sera engagée en procès avec vous.

« Il est cependant possible qu’il faille du temps à miss Mowbray pour en venir là, et je crains que vous ne soyez gêné dans vos opérations par votre rival. Or, je songe avec plaisir qu’ici je puis vous être de quelque utilité, à cette condition spéciale qu’il n’existera plus la moindre idée de voies de fait entre vous, et que vous emploierez toute la force de votre esprit à combattre cette haine impie. Si vous m’en donnez votre parole, je me jetterai aussitôt dans une chaise de poste pour aller vous joindre. Je chercherai moi-même ce Martigny, et j’ai la vanité de croire que je lui persuaderai de nous débarrasser de sa personne. Mais il ne vous faudra pas, en cas de besoin, regarder à un sacrifice d’argent, même considérable. Je ne puis penser que vous ayez à craindre quelque chose de sérieux d’un procès relativement à vos biens et à votre titre, car je ne puis croire qu’une cérémonie légale ait eu lieu entre votre respectable père et cette dame française. Je vous répète donc que je ne doute pas de pouvoir satisfaire aisément les prétentions de Martigny, et le décider à quitter l’Angleterre. Fiez-vous à moi, je trouverai moyen de le faire fléchir. Peu importe, direz-vous, pour la réussite de vos desseins, que ce soit la distance ou le tombeau qui vous sépare : peu importe ! sinon que de ces deux buts vous pouvez atteindre l’un avec honneur et sans péril, tandis que l’autre, si vous tentiez d’y parvenir, vous attirerait une exécration générale et un châtiment mérité. Dites un mot, et j’arriverai près de vous.

« Harry Jekill. »

À cette épître admonitoire, l’auteur reçut par le retour du courrier la réponse suivante :

« Mon dévoué Harry Jekill me semble avoir pris un ton d’exaltation que n’exigeait pas la circonstance. S’il faut le redire pour la millième fois, je n’ai pas dessein d’agir avec ce drôle comme j’agirais à l’égard de tout autre. Puisque le sang de mon père coule dans ses veines, il sauvera la peau que sa mère lui a donnée : ainsi donc arrivez, sans étaler davantage vos stipulations et vos arguments ; venez à vos propres conditions, et le plus promptement possible. Tout à vous.

Étherington. »

P. S. Un mot encore : ne parlez à personne ni de moi ni de votre projet de voyage. J’ai soigneusement caché à tout autre que vous mon projet de venir ici ; cependant Martigny l’a su et il y est